Devenir des chrétiens de caractère !

Prêtez attention. Ce mot, caractère, on l’entend souvent, non !? Mais sans jamais vraiment le définir, comme si l’on devinait son sens tout seul. Rien d’évident pourtant. … cette semaine encore, en visitant une entreprise, une pièce mécanique qui assurait le mélange de différents produits de lavage portait l’étiquette : mélangeur de caractère ! J’ai compris que cela avait quelque chose à voir avec une pièce de qualité, qui fait entièrement le job attendu. Et là, un footballeur qui dit avec satisfaction au journaliste en fin de match : « Oui, notre équipe a montré du caractère. » Je comprends que cela a quelque chose à voir avec du panache, de la force collective, de la persévérance dans l’adversité ! Et là, un ami qui me met en garde : fais attention, Untel a un sacré caractère ! Je comprends qu’il est comme le lait sur le feu : explosif , excessif, mieux vaut éviter de le chauffer !

Le caractère

Le caractère, c’est tout cela et bien plus encore. Le « caractère » prend des sens différents selon les contextes. Le caractère est salué lorsqu’il indique panache, ténacité, entièreté ou craint lorsqu’il indique explosivité ou au contraire, mollesse, ou encore pénibilité dans la relation.

Le caractère, comme le dit le philosophe Paul Ricœur, « c’est toujours ma manière propre de penser, non ce que je pense. […] pouvoirs, motifs, vouloir, tout en moi porte la marque d’un caractère[1]. » Voilà une belle définition, le caractère, c’est donc ma manière d’être dans ce monde, ma manière d’utiliser toutes les capacités et habiletés que j’ai développées. Elle m’est propre et unique, parce qu’informée et formée par toute ma vie. Si proche de moi-même, que, pour reprendre une belle formule du théologien anglican N.T. Wright, le caractère est simplement une « seconde nature[2] ».

Le caractère, inné ou acquis ?

Il y a des tendances données au départ, qu’on peut appeler des traits de caractère ou encore un tempérament. Celui-ci est plus appliqué qu’un autre. Cela se voit dès les premières années de vie, lorsqu’il dessine avec soin ou remplit des pages calligraphiées de belles lettres. Mais une manière d’être, ça se travaille aussi tout au long de la vie. Si celui qui est appliqué au départ est encouragé à l’être encore davantage, il deviendra probablement pointilleux dans tous les domaines de sa vie. Il aura  alors développé un véritable caractère perfectionniste, mélange de dispositions innées et acquises au fil du temps. Mais s’il est encouragé à faire parfois autrement, parfois plus rapidement, parfois moins qualitativement alors il développera un caractère davantage polyvalent. Appliqué, il pourra toujours l’être, rapide, cela ne lui était pas donné naturellement, mais il l’aura appris au fil des années. Ainsi, notre caractère est bien fait de validations ou d’adaptations de traits naturels. Il comprend ce que nous faisons de ce qui nous a été donné au départ. Il n’y a donc aucune fatalité, mais plutôt un dynamisme et une invitation à enrichir nos manières d’être au fil du temps.

Le caractère dans la Bible

Et la Bible, que dit-elle du caractère ?

·       Presque rien si l’on s’en tient au vocabulaire. Le mot caractère ne s’y trouve pas, ou peu. Cela dépend de notre manière de traduire certains mots.  Par exemple la Nouvelle Français Courant (NFC) rend ainsi Romains 5.3-4 :

« Bien plus, nous mettons notre fierté même dans nos détresses, car nous savons que la détresse produit la persévérance, que la persévérance produit le courage dans l'épreuve et que le courage produit l'espérance. »

« courage dans l’épreuve » traduit le grec « Dokime ». l’English Standard Version, une version biblique anglaise assez littérale, rend « Dokime » par « character ». En français, cela donnerait : la détresse produit la persévérance qui produit… le caractère … qui produit l’espérance. Le caractère devient alors le trait d’union qui permet de relier épreuve et espérance. Autrement dit, au contact des épreuves se forge le caractère qui agit comme un rempart contre le flot des épreuves et nous aide à tendre vers l’espérance.

·     Alors on peut aussi dire que la Bible parle presque en son tout d’un caractère chrétien si l’on comprend que cela désigne des manières d’êtres face aux épreuves, teintées de foi et d’espérance en un Dieu agissant, en un Dieu lui-même de caractère[3] ! Un grand théologien du caractère, Stanley Hauerwas, propose cette définition de l’Église et de la vie chrétienne : « L'Église, dans son expression la plus profonde, est le rassemblement de personnes capables de se soutenir mutuellement à travers les tragédies inévitables de nos vies. Elles sont capables de le faire parce qu'elles ont été formées par un récit, constamment rejoué à travers le partage d'un repas, qui n'affirme rien de moins que ceci : Dieu a pris le caractère tragique de notre existence dans sa propre vie[4]. » Des personnes de caractère, impliquées dans une grande Histoire qui a du caractère, formées en un peuple de caractère, soutenues et conduites par un Dieu de caractère.

La grâce qui va jusqu’à la formation de notre caractère

Une manière d’être, ça se travaille, et ça coûte quelque chose, dans tous les sens du terme ! le théologien Dietrich Bonhoeffer dénonçait la propension des chrétiens à se cantonner dans une certaine facilité de la vie chrétienne, à désirer et vivre une grâce « à bon marché » :

La grâce à bon marché, c’est la prédication du pardon sans repentance, c’est le baptême sans discipline ecclésiastique, c’est la cène sans confession des péchés, c’est l’absolution sans confession personnelle. La grâce à bon marché, c’est la grâce sans la marche à la suite de Jésus, la grâce sans la croix, la grâce abstraction faite de Jésus Christ vivant et incarné[5].

La grâce à bon marché que décrit si bien Bonhoeffer, c’est la grâce sans caractère, la grâce dépouillée de toute la dimension transformatrice de nos manières d’être. A cette grâce « à bon marché », Bonhoeffer oppose une « grâce qui coûte », une grâce incarnée en Jésus-Christ qui va jusqu’au martyre. Une grâce qui nous dit que nous n’avons pas seulement à recevoir le salut comme une déclaration, mais à vivre le salut comme le changement de notre vaine manière de vivre pour une manière d’être à la suite de Jésus-Christ. Une grâce qui nous dit que le salut chrétien, c’est la longue et difficile incorporation de la repentance, du pardon, de l’amour de l’ennemi, du fruit de l’Esprit.

Invitation à la formation « chrétiens de caractère » à Pfastatt, année scolaire 2025-2026.

Ces dernières années, l’éthique chrétienne redécouvre la centralité du caractère et des vertus pour décrire la profondeur de la vie chrétienne, interpeller et amener à une plus grande conformation de nos vies à celle de Jésus-Christ. Ce courant est ancien, mais il connaît un regain d’intérêt ces dernières années. Le monde séculier s’en est emparé dans une version sécularisée sans Dieu, en témoigne les rayons de libraires remplis d’ouvrages de développement personnel.

La formation « chrétiens de caractère » proposée par le Bienenberg cet automne à Pfastatt, ne vise pas le développement personnel, mais plutôt le développement chrétien. Le développement des attitudes, habitudes, habiletés de la vie chrétienne puisées au fil du récit biblique, manifestées le plus parfaitement par la vie de Jésus-Christ, et fortifiées en nous par l’Esprit saint.

Cette formation est pour vous :

·       Si vous croyez que Jésus ne veut pas seulement sauver votre âme, mais qu’il veut transformer toute votre manière d’être, à sa ressemblance ! Jésus est notre modèle.

·       Si vous êtes conscients que vous ne pouvez pas changer seul, mais que vous avez besoin d’une communauté pour accompagner votre changement, besoin de chrétiens autour de vous pour mieux être chrétiens en vous-même.  Nous sommes une partie du corps de Jésus.

·       Si vous êtes convaincus qu’aimer Jésus, c’est aussi le suivre sur le chemin du pardon donné et reçu, sur le chemin de l’abandon confiant en Dieu,  sur le chemin de toutes les pratiques spirituelles. Jésus est notre chemin.

·       Si vous voulez fouiller dans le texte biblique pour y découvrir ces processus longs, difficiles et coûteux de transformation sur la durée de toute une vie. Jésus est la vérité.

·       Si vous êtes prêts à faire confiance aux surprises de la vie, à accueillir les épreuves et les temps calmes comme des dons de Dieu. Jésus est la vie et L’Esprit saint est l’agent du changement de la vie chrétienne.

Cette formation se déroulera en un parcours sur six samedis, d’octobre 2025 à avril 2026. Nous vous fournirons également des éléments bibliographiques, pour nourrir votre connaissance, et des exercices pratiques à réaliser d’un mois à l’autre. Ce sera le quatrième lieu ou ce parcours est proposé depuis 2022. Les bilans faits chaque année sont très positifs, les participants nous disent qu’ils marchent sur un chemin de transformation. Alors, prêts à goûter à une formation de caractère ?

Inscription avant le 30 septembre 2025 : Inscription Séminaires — BIENENBERG

 

Une représentation des composantes du caractère sur lesquelles nous travaillerons cette année

A bientôt,

 

Alexandre








[1] Paul Ricœur, Philosophie de la volonté 1. Le volontaire et l’involontaire, Paris, Aubier, 1949, p. 347.

[2] N. T. Wright, After you believe: why Christian character matters, 1st HarperCollins pbk. ed, New York, HarperCollins, 2012, p. 41.

[3] L’English Standard Version fait le choix de parler de l’immutabilité de Dieu (le fait que Dieu est constant et ne change pas) dans l’épître aux Hébreux en utilisant le mot “character” : “So when God desired to show […] the unchangeable character of his purpose… “. La ferme résolution, l’impossibilité pour Dieu de mentir ou de se corrompre sont incluses lorsque l’on dit que Dieu a un caractère constant !

[4] Stanley Hauerwas, A Community of Character: Toward a Constructive Christian Social Ethic, Notre Dame, University of Notre Dame Press, 1981, p. 108.

[5] Dietrich Bonhoeffer, (Nouvelle édition traduite par Bernard Lauret), Vivre en disciple: le prix de la grâce, coll. Œuvres de Dietrich Bonhoeffer vol. 4, Genève, Labor et fides, 2009, p. 24.