Le soin de la création, juste un effet de mode ?
Un article de Clément Blanc, pasteur et ambassadeur A Rocha.
Au regard de l’omniprésence de l’écologie dans le discours public, par les médias, les politiques, ou les publicitaires, on peut se sentir submergé et parfois espérer que le sujet soit mis en sourdine, ne serait-ce que pour un temps. Alors quand c’est l’Église qui met à son agenda le soin de la création, il peut y avoir un sentiment de ras-le-bol en considérant que l’Église ne fait que suivre le sujet « à la mode », en se laissant influencer par la société.
L’Église devrait-elle marquer sa différence en refusant d’aborder le sujet de l’écologie ? Ou devrait-elle au contraire-t-elle être la première à souligner l’importance de prendre soin de la création ?
Un moment dans l’histoire
Dans notre relation avec la société, nous n’avons pas à choisir entre simplement suivre le mouvement, ou nous couper du monde qui nous entoure pour vivre de manière indépendante. Être attentif à nos circonstances est au contraire une source permanente d’opportunités pour redécouvrir la richesse de la Bible et apprendre à mettre en pratique son enseignement fidèlement. Les mêmes vérités immuables que nous trouvons dans la Parole trouvent un écho différent dans un monde en perpétuelle évolution. Si nous voulons mettre en pratique tout ce que Jésus nous a enseigné (Mt 28.19), nous devons bien sûr être attentifs à ce qu’il nous a enseigné. Mais nous devons également être attentifs au monde dans lequel nous devons le mettre en pratique. Il me semble que c’était le sens de l’éditorial de Marie-Noëlle Yoder dans le magazine du Bienenberg, quelques mois après le début de la guerre en Ukraine lorsqu’elle disait :
« Heureux les artisans de paix », disait Jésus (Mt 5.9). Cette expression si souvent entendue et répétée prend un sens nouveau en temps de guerre. Elle paraît soudain plus engageante, plus délicate à mettre en œuvre.[1]
Nous sommes toujours appelés à être des artisans de paix, mais notre identité d’artisans de paix s’exprime différemment suivant les circonstances géopolitiques dans lesquelles nous vivons.
Concernant le soin de la création, c’est justement parce que nous vivons un moment historique que nous devons prendre le temps de redécouvrir la richesse de la Bible sur le sujet et apprendre à suivre fidèlement Jésus dans les circonstances qui sont les nôtres. Depuis le début de la révolution industrielle, la capacité de l’humanité à transformer le monde a progressé comme jamais auparavant. Les progrès techniques et l’abondance d’énergie ont produit des fruits remarquables. Mais comme l’a dit un grand philosophe, « un grand pouvoir implique de grandes responsabilités » et malheureusement, l’humanité utilise aussi ses nouveaux pouvoirs pour détériorer profondément la création. Climat, biodiversité, pollutions, épuisement des ressources, les voyants sont au rouge, et tout indique qu’il faille nous préparer à ce que la situation continue d’empirer. Il est donc temps d’interroger la Bible pour discerner avec l’aide de l’Esprit comment être fidèles au Créateur dans ce temps de crises.
Redécouvrir un patrimoine oublié
Voici quelques exemples d’enseignements bibliques qui apparaissent sous un jour nouveau dans notre contexte de crises écologiques multiples :
Dieu a confié à l’humanité la mission de dominer, cultiver et garder sa création en tant que créatures, créées à son image (Gn 1 et 2). Comment être fidèle à ce mandat dans une humanité qui exploite bien plus qu’elle garde la création ?
La beauté, l’harmonie, la grandeur et la diversité de la création sont pour Dieu des moyens pour révéler à l’humanité sa gloire (Jb 39-41 ; Ps 104 ; Rm 1.19-20 ; Ac 14.17, 17.24-27 ; Ap 4.11). Prendre soin de la création c’est aussi préserver cette source d’adoration pour les chrétiens et ce témoignage pour les non-chrétiens.
Les crises écologiques sont majoritairement causées par les plus riches et les victimes d’un environnement détérioré sont d’abord les plus pauvres. Plus que jamais, il est essentiel de refuser de servir « Mammon » en choisissant la générosité et la solidarité plutôt que l’accumulation des richesses.
Derrière les crises se cachent des intérêts économiques et politiques contrôlés par des puissants cherchant toujours à atteindre de nouveaux sommets plutôt qu’à servir l’intérêt commun. Comment l’Église peut-elle marquer sa différence par rapport à ces forces que la Bible décrirait comme « babyloniennes » pour être les témoins du Royaume de Dieu sur terre.
Face à des perspectives de plus en plus anxiogènes, l’Église à l’opportunité de réapprendre à trouver la paix dans son espérance de vivre un jour dans un monde entièrement renouvelé où les crises écologiques ne seront plus qu’un lointain souvenir.
Notre patrimoine biblique est vaste et la liste pourrait être prolongée. Voilà pourquoi il est temps de prendre le temps de se plonger dans ce patrimoine pour redécouvrir ensemble, avec l’aide de Dieu, comment prendre soin de la création dans un monde en crise.
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[1] Marie-Noëlle Yoder, Bienenberg Magazine, éditorial, automne 2022, italique ajouté.