Théologie

Mobilisation d'une Église pour FBSE

Un article de Lucile Anger, ancien de l’Église mennonite de Colmar-Ingersheim en concertation avec le collège d’ancien.

Au cours des 12 dernières années, 19 membres de l’Église de Colmar-Ingersheim ont suivi la Formation Biblique pour le Service dans l’Église (FBSE) du Bienenberg. D’autres les avaient précédés plus loin dans le temps. Comment expliquer un tel engouement ?

Donner envie

Les raisons sont diverses et s’entremêlent. Il est difficile de définir le point de départ, un peu comme répondre à la question de savoir qui de l’œuf ou la poule est premier ! Il est certain que la formation au Bienenberg est encouragée par les responsables d’Église, qui l’ont eux-mêmes suivie, afin d’être mieux équipés pour le service.

Cela dit, le fait de côtoyer dans l’Église ceux qui sont à FBSE est la meilleure invitation à s’y engager soi-même. En effet, tous ceux qui en reviennent sont enchantés, boostés. Du coup, certains s’inscrivent sans y avoir été spécialement invités, parce qu’ils y voient un moyen d’approfondir leur foi, ou parce qu’ils ressentent le besoin d’être nourris dans leur(s) engagement(s). Mais surtout, les personnes qui ont bénéficié de FBSE désirent que d’autres puissent en bénéficier à leur tour. Certains ont plus particulièrement à cœur de discerner ceux qui pourraient suivre cette formation, d’aller les voir pour leur en parler et les y inviter personnellement, ce qui a plus d’impact qu’une information à tous.

Atouts de la formule

Dans cet effet d’entraînement, d’autres éléments entrent en jeu, notamment lorsque plusieurs personnes de la communauté y vont en même temps : le fait de covoiturer pour s’y rendre — ce qui offre du temps d’échange —, de pouvoir vivre ensemble sur place, lors des repas, en partageant la même chambre, les mêmes enseignements, renforce les liens. C’est l’occasion de rencontrer des chrétiens d’autres Églises (pas seulement mennonites), de s’écouter et d’échanger. C’est aussi un moment, hors du cadre habituel (famille, travail, Église), propice au recul et au ressourcement. La formule du vendredi soir au samedi après-midi est bien adaptée à la plupart des situations. Et la variété des enseignements comme des intervenant(e)s, leur ouverture, sont enrichissants et permettent à chacun de trouver ce qui lui correspond.

Implication concrète de l’Église locale

L’Église de Colmar-Ingersheim, parce qu’elle estime que la formation est importante, prend en charge une partie des frais, de même que ceux d’EFraTA, des formations décentralisées pour responsables d’Église, de la formation au BAFA[1]… De plus, pour permettre aux couples ayant de jeunes enfants de se libérer pour se former, les autres parents s’organisent pour prendre en charge les enfants. Par ailleurs, les week-ends de formation, avec les sujets traités, sont évoqués lors des annonces, le dimanche qui précède ; les personnes qui y participent sont nommées, et sont à nouveau citées lorsqu’elles ont validé leur formation. Cela rend FBSE familier et associe la communauté à ce que certains de ses membres entreprennent.

Impact dans l’Église

L’Église est encouragée dans sa « politique » de formation, car elle en constate les bénéfices, tant au niveau individuel que communautaire : les apports bibliques et théologiques, ainsi que leur implication éthique, nourrissent les enseignements (prédications, études bibliques, catéchisme…), plus riches et fondés. Les spécificités et valeurs anabaptistes sont davantage mises en avant, ce qui crée un rééquilibrage par rapport à certains courants évangéliques, au niveau du contenu des enseignements, mais aussi de la vie de l’Église (sens de la cène, du baptême, du salut, de la communauté, vie de disciple, etc.). Même si différentes tendances théologiques et spirituelles coexistent, il y a une impulsion. La formation consolide les engagements, voire l’aide à prendre son envol. Il se trouve que tous ceux qui sont depuis un certain temps au conseil d’Église (sauf un qui a suivi une autre formation par le passé), ainsi que les anciens, ont suivi la formation FBSE (et certains d’entre eux également EFraTA). Cela contribue à la cohésion des équipes, aide à parler d’une seule voix, ce qui transparaît dans la vie de l’Église, et souligne le lien fort entre formation et service.

[1] Formation au BAFA en lien avec le grand nombre d’enfants de tous âges dans l’Église d’Ingersheim.

L'oecuménisme, une question débattue

Avant chaque journée Points chauds, un exercice préparatoire est donné aux participants pour se préparer à ce qu’ils vont entendre. La prochaine journée traitera de l’œcuménisme. La consigne? Regarder la vidéo ci-dessous et répondre aux deux questions ci-dessous. Et vous qu’en dites vous?

L’œcuménisme

Conférence de Campus protestant : Les mots de la foi
Idée de Antoine Nouis et Jean-Luc Mouton. Présenté par Gérard Rouzier

Plusieurs raisons (secondaires) plaident en faveur de l’œcuménisme :

  • L’esthétique : L’unité est préférable à la division.

  • L’évangélisation : Les divisions sont un contre-témoignage.

  • Le souci pastoral : Il y a de nombreux couples interconfessionnels dans nos Églises.

Raison fondamentale : L’œcuménisme est une exigence spirituelle

Les différences appartiennent à la création. Elles sont dans le monde, nos Églises, nos familles, etc.

Face à ces différences, il y a deux péchés à éviter :

  • L’uniformité : Nier la diversité en voulant que tout le monde soit pareil. Un des Pères de l’Église, Basile de Césarée, a dit : « C’est la même eau fraîche et féconde qui tombe sur le champ afin que fleurissent rouge le coquelicot, rose la rose et bleu le bleuet. »

  • L’indifférence : Désinvolture qui consiste à ignorer ceux qui sont différents de nous et à croire que nous n’avons pas besoin les uns des autres.

Entre ces deux écueils, l’œcuménisme cherche une juste relation entre les Églises.

Trois formes d’œcuménisme :

  • L’œcuménisme théologique : Travail sur les vraies et les fausses différences. Il cherche à rapprocher les positions et à se mettre d’accord sur les désaccords.
    Cet œcuménisme est important mais arrive un moment où les désaccords sont irréductibles et indépassables sauf à demander à une Église de renoncer à ce qui est pour elle fondamental.

  • L’œcuménisme de l’hospitalité : Démarche spirituelle qui prend en compte les différences, et qui cherche à accueillir et à aimer ce qui fonde ces différences. Œcuménisme qui consiste à s’inviter et se visiter les uns les autres. (Hébreux 13.1 : « N’oubliez pas l’hospitalité, il en est qui en l’exerçant, ont à leur insu, loger des anges.»)

  • L’œcuménisme de l’objection : Il ne s’agit pas seulement d’accueillir les différences, mais de demander à chacun de formuler les objections qu’il adresse à l’autre. Cela repose sur l’idée que chaque Église permet à l’autre d’éviter de tomber du côté où elle penche.
    Le protestantisme peut aider l’֤Église catholique à se préserver d’un absolutisme qui la menace. Le catholicisme rappelle au protestantisme que la théologie a une histoire, et que l’Église est universelle.

Exemple biblique : Dans l’épître aux Galates (chapitre 2), Paul parle de la grande question qui se posait à la première Église : la cohabitation entre les juifs et les non-juifs : fallait-il marquer cette différence et avoir des Églises séparées ? Ou abolir les différences ?
La question a été traitée à la rencontre de Jérusalem.
Après avoir évoqué les deux positions, Paul termine ainsi : « Lorsque Jacques, Céphas et Jean (chefs de l’Église) ont reconnu la grâce qui m’avait été accordée, alors ils nous ont donné la main droite à Barnabé et à moi en signe de communion. Nous irions nous vers les non-juifs, et eux vers les circoncis. Nous devions seulement nous souvenir des pauvres, ce que je me suis empressé de faire. »

Trois éléments dans ce texte peuvent inspirer le dialogue œcuménique :

  • Évoquer les différences : Paul aurait pu poursuivre sa mission sans se soucier de ceux qui n’étaient pas d’accord avec lui. Il a tenu à aller à Jérusalem pour les rencontrer et exposer sa position. Lorsque la différence est apparue irréductible, ils ont décidé de partir chacun de leur côté.

  • Se séparer en se donnant la main droite. Le signe est éloquent : tendre la main droite, c’est refuser de se séparer sans se donner mutuellement un signe de paix. Le geste a des allures d’une bénédiction « Que Dieu t’accompagne sur ton chemin ».

  • Faire ensemble tout ce qui est possible. Ne pas être d’accord sur les prescriptions du judaïsme n’empêche pas de s’occuper ensemble des pauvres.

Ce passage propose un chemin pour les relations entre les Églises :

  • Éclaircir les différences pour repérer celles qui sont irréductibles.

  • Honorer ces différences tout en appelant la bénédiction de Dieu sur les autres Églises.

Faire ensemble tout ce qu’on n’est pas obligé de faire séparément, notamment l’action sociale.

Merci à Jane-Marie Nussbaumer pour la retranscription de la vidéo.




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Réflexion après le début de la formation Points chauds...

Après un week-end d’introduction sur les théories de l’interprétation de la Bible et sur la communication non-violente, la formation Points chauds a véritablement démarré, avec

  • une journée à Pulversheim (F) sur la prédestination et

  • une journée à Tramelan (CH) sur les sens de la mort du Christ.

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Quelques réflexions

Je partage quelques réflexions inspirées par les apports de Neal Blough et de Jacques Nussbaumer à Tramelan.

Certains participants ont découvert que la question du sens ou des sens de la mort du Christ faisait débat au sein des Églises évangéliques. Deux positions (il y a en d’autres) ont été présentées :

  • Le modèle du Christ victorieux (Neal Blough)

  • Le modèle de la substitution pénale (Jacques Nussbaumer).

 Les intervenants ont résumé ainsi leur position respective.

  • Pour le Christ victorieux : « par la mort et la résurrection du Christ, Dieu a vaincu les forces du mal et de la mort, opérant ainsi le pardon et la libération de l'esclavage du péché. »

  • Pour la substitution pénale : « Par sa mort sur la croix, Jésus-Christ a porté la peine que méritait le péché des hommes, se substituant à eux. »

 Les deux présentations ont permis d’affiner la perception que l’on peut avoir de chaque position. On évite ainsi les caricatures qui n’aident pas à la compréhension mutuelle et au dialogue. Cela demande un vrai travail théologique et de réelles compétences en exégèse, en herméneutique, en dogmatique.

Les deux présentations ont mis en évidence l’importance du rôle de l’histoire de l’Église, quand les chrétiens, à diverses époques, élaborent des doctrines à partir des textes bibliques, mettant l’accent sur tel aspect plutôt que sur tel autre, et cherchant à répondre à des problématiques particulières, liée à un contexte historique.

 On a aussi pu s’apercevoir que, pour chaque position présentée sur le sujet, des dérives peuvent exister, qu’il s’agit de reconnaître pour chaque tenant d’une position, et qu’il s’agit pour l’autre de ne pas absolutiser.

 Les intervenants, tout en affirmant leur désaccord avec convictions, ont dialogué de manière fraternelle et respectueuse. A la fin de la journée, une participante a déclaré que leur manière d’être en dialogue donnait de l’espoir pour d’autres situations et était donc source d’inspiration.

Une question

Les deux positions sont-elles exclusives ou peuvent-elles être vues comme complémentaires ? Ou plus précisément : une des positions a-t-elle une importance prépondérante ?

La journée avait commencé par une animation invitant chaque participant à se positionner physiquement sur une ligne imaginaire, entre les deux positions affichées aux deux extrémités de la salle. Ce placement géographique donnait à voir que l’on peut être pour la position A, mais plus ou moins ; ou pour la position B, mais plus ou moins – ce qui évite les généralisations abusives. A la fin de la journée, une participante a partagé que si l’exercice était refait alors, son positionnement ne serait plus le même, parce qu’elle avait mieux compris la visée et la portée de la position de la substitution pénale.

Suite des découvertes le samedi 1er décembre à Pulversheim sur l’homosexualité avec Nicolas Farelly et Elian Cuvillier, et le samedi 8 décembre sur la non-violence ou la guerre juste, avec Alexandre Nussbaumer et Matthieu Sanders.