Spiritualité

Mobilisation d'une Église pour FBSE

Un article de Lucile Anger, ancien de l’Église mennonite de Colmar-Ingersheim en concertation avec le collège d’ancien.

Au cours des 12 dernières années, 19 membres de l’Église de Colmar-Ingersheim ont suivi la Formation Biblique pour le Service dans l’Église (FBSE) du Bienenberg. D’autres les avaient précédés plus loin dans le temps. Comment expliquer un tel engouement ?

Donner envie

Les raisons sont diverses et s’entremêlent. Il est difficile de définir le point de départ, un peu comme répondre à la question de savoir qui de l’œuf ou la poule est premier ! Il est certain que la formation au Bienenberg est encouragée par les responsables d’Église, qui l’ont eux-mêmes suivie, afin d’être mieux équipés pour le service.

Cela dit, le fait de côtoyer dans l’Église ceux qui sont à FBSE est la meilleure invitation à s’y engager soi-même. En effet, tous ceux qui en reviennent sont enchantés, boostés. Du coup, certains s’inscrivent sans y avoir été spécialement invités, parce qu’ils y voient un moyen d’approfondir leur foi, ou parce qu’ils ressentent le besoin d’être nourris dans leur(s) engagement(s). Mais surtout, les personnes qui ont bénéficié de FBSE désirent que d’autres puissent en bénéficier à leur tour. Certains ont plus particulièrement à cœur de discerner ceux qui pourraient suivre cette formation, d’aller les voir pour leur en parler et les y inviter personnellement, ce qui a plus d’impact qu’une information à tous.

Atouts de la formule

Dans cet effet d’entraînement, d’autres éléments entrent en jeu, notamment lorsque plusieurs personnes de la communauté y vont en même temps : le fait de covoiturer pour s’y rendre — ce qui offre du temps d’échange —, de pouvoir vivre ensemble sur place, lors des repas, en partageant la même chambre, les mêmes enseignements, renforce les liens. C’est l’occasion de rencontrer des chrétiens d’autres Églises (pas seulement mennonites), de s’écouter et d’échanger. C’est aussi un moment, hors du cadre habituel (famille, travail, Église), propice au recul et au ressourcement. La formule du vendredi soir au samedi après-midi est bien adaptée à la plupart des situations. Et la variété des enseignements comme des intervenant(e)s, leur ouverture, sont enrichissants et permettent à chacun de trouver ce qui lui correspond.

Implication concrète de l’Église locale

L’Église de Colmar-Ingersheim, parce qu’elle estime que la formation est importante, prend en charge une partie des frais, de même que ceux d’EFraTA, des formations décentralisées pour responsables d’Église, de la formation au BAFA[1]… De plus, pour permettre aux couples ayant de jeunes enfants de se libérer pour se former, les autres parents s’organisent pour prendre en charge les enfants. Par ailleurs, les week-ends de formation, avec les sujets traités, sont évoqués lors des annonces, le dimanche qui précède ; les personnes qui y participent sont nommées, et sont à nouveau citées lorsqu’elles ont validé leur formation. Cela rend FBSE familier et associe la communauté à ce que certains de ses membres entreprennent.

Impact dans l’Église

L’Église est encouragée dans sa « politique » de formation, car elle en constate les bénéfices, tant au niveau individuel que communautaire : les apports bibliques et théologiques, ainsi que leur implication éthique, nourrissent les enseignements (prédications, études bibliques, catéchisme…), plus riches et fondés. Les spécificités et valeurs anabaptistes sont davantage mises en avant, ce qui crée un rééquilibrage par rapport à certains courants évangéliques, au niveau du contenu des enseignements, mais aussi de la vie de l’Église (sens de la cène, du baptême, du salut, de la communauté, vie de disciple, etc.). Même si différentes tendances théologiques et spirituelles coexistent, il y a une impulsion. La formation consolide les engagements, voire l’aide à prendre son envol. Il se trouve que tous ceux qui sont depuis un certain temps au conseil d’Église (sauf un qui a suivi une autre formation par le passé), ainsi que les anciens, ont suivi la formation FBSE (et certains d’entre eux également EFraTA). Cela contribue à la cohésion des équipes, aide à parler d’une seule voix, ce qui transparaît dans la vie de l’Église, et souligne le lien fort entre formation et service.

[1] Formation au BAFA en lien avec le grand nombre d’enfants de tous âges dans l’Église d’Ingersheim.

Grandir en caractère

Une interview d’Alexandre Nussbaumer qui permet de mieux comprendre ce qu’est-le caractère en spiritualité chrétienne.

Alexandre Nussbaumer, es-tu un homme de caractère ?

Je l’espère ! Mais à une telle question, ce sont mes proches qui devraient répondre.
Jésus a demandé à ses disciples : « Et pour vous, qui suis-je ? » (Mt 16.15). C’est Pierre qui va affirmer « Toi, tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16.16). Ainsi, « qui suis-je ? » est directement en lien avec l’empreinte que je laisse sur la vie des autres et qu’ils sont mieux à même d’exprimer.

Comment définir la notion de « caractère » en théologie ?

Partons d’une définition simple du caractère comme « manières habituelles de se comporter, de réagir[1]. » Le niveau des comportements représente la partie émergée, visible, de l’iceberg caractère. Descendons un peu plus profondément, avec la définition qu’en propose le philosophe Paul Ricœur : « le caractère c’est toujours ma manière propre de penser, non ce que je pense. […] pouvoirs, motifs, vouloir, tout en moi porte la marque d’un caractère[2]. » Ainsi, le caractère s’exprime dans ma manière d’être présent au monde, à moi-même, à Dieu. La théologie va s’intéresser à l’action de Dieu au sein de cette structure plutôt stable. Comment la vie de Jésus peut-elle amener quelqu’un à une nouvelle manière de vivre ? Comment Paul peut-il écrire aux Galates : « … ce n’est plus moi qui vis, mais c’est le Christ qui vit en moi. Car ma vie humaine, actuelle, je la vis dans la foi du Fils de Dieu… » (Ga 2.20) ?

À quoi ressemble une personne de caractère ?

Le caractère a quelque chose à voir avec les notions d’intégrité et de constance. Une personne de caractère montre le même visage dans toutes les situations.

L’éthique chrétienne n’est-elle pas là pour nous aider à différencier entre ce que les chrétiens doivent faire et ce qu’ils ne doivent pas faire pour respecter la volonté de Dieu ?

Faire/ne pas faire est l’approche privilégiée d’une focale ciblée. L’éthique du caractère propose une focale large, elle s’intéresse davantage au registre être/ne pas être. Plutôt que de demander : « ai-je droit de faire telle chose ? », elle demandera : « quel genre de personne vais-je devenir si je fais telle chose ? » Lorsque Paul écrit aux Corinthiens « Tout est permis, mais tout n’est pas utile ; tout est permis, mais tout n’est pas constructif » (1 Co 10.23), il inscrit « permis/pas permis » dans une perspective plus large : qu’est-ce que je construis au juste ? On a parfois besoin d’une focale courte, parfois d’une focale plus large.

Quelle est la place de la Bible et de la prière pour construire le caractère chrétien ?

Elles en sont des piliers essentiels. Un caractère s’appuie sur plusieurs piliers. Notamment un récit/histoire qui permet d’incorporer le temps. Par exemple, Abraham, Moïse, Daniel, Jésus, Paul, Pierre, les martyrs de l’Apocalypse adorent Dieu seul et refusent d’adorer un pouvoir humain. Cette répétition permet au lecteur de comprendre qu’adorer Dieu seul est au cœur du caractère chrétien et que cela peut aller jusqu’à coûter la vie. Un caractère se construit aussi par l’acquisition de compétences qu’on appellera vertus ou encore habitudes opératives. La prière est une vertu essentielle. Agir en chrétien ne peut se faire qu’au travers d’elle.

Quelles sont les conséquences d’un manque de caractère ?

L’hypocrisie (littéralement, se cacher sous un masque), la séduction ou la flatterie, la tromperie, l’opportunisme. Ce sont des manières d’être piloté davantage par le bénéfice escompté d’une situation que par un fond intègre et constant.

Comment grandir en caractère chrétien ?

Suivre la formation « Chrétiens de caractère » proposée prochainement par le Bienenberg à Tavannes est une bonne première proposition ! Pour ceux plus avancés, Dietrich Bonhoeffer recommandait aux étudiants de son séminaire de commencer toutes leurs journées par une heure de prière. Grandir en caractère chrétien, c’est laisser Dieu imprégner toute notre personne et cela passe par une forme d’abandon confiant en Dieu.

Quel lien vois-tu entre l’éthique du caractère et la théologie anabaptiste ?

Dans cette ligne du caractère, Hauerwas énonce que la tâche de l’éthique théologique est « d’énoncer le langage de la foi en termes de la responsabilité chrétienne d’être formé en la ressemblance du Christ[3]. » Une conviction très anabaptiste ! Un abandon confiant en Dieu ? Voilà une bonne définition de la Gelassenheit anabaptiste. L’insistance de l’éthique du caractère sur la vision, sur la communauté, sur le récit, fait écho à des convictions centrales de l’anabaptisme sur l’eschatologie, la discipline d’Église et le sermon sur la montagne. Ainsi l’éthique du caractère peut être utilisée comme une grille de lecture de l’anabaptisme.

Pour aller plus loin

Découvrez la formation « Chrétiens de caractère », démarrage le 5 octobre 2024 à Tavannes, BE (Suisse)

[1] François Lelord, Christophe André, Comment gérer les personnalités difficiles, Paris, O. Jacob, 2010, p. 10.

[2] Paul Ricœur, Philosophie de la volonté 1. Le volontaire et l’involontaire, Paris, Aubier, 1949, p. 344-345.

[3] Stanley Hauerwas, Vision and Virtue. Essays in Christian Ethical Reflection, Notre Dame, Fides Publishers, 1974, p. 29.

Retrouver le sens du temps - l'interview!

Interview avec les auteurs du livre Retrouver le sens du temps, un parcours de méditation et de prière.

Retrouver le sens du temps, s’arrêter, faire une pause, c’est possible à la rentrée ? Rencontre avec les auteurs du livre Retrouver le sens du temps pour comprendre l’importance de s’arrêter, même en période d’activité intense, et profiter pleinement de ce livre et des ses enseignements pour votre vie.

1. En quelques mots, pourquoi ce thème « retrouver le sens du temps » et quel est l’objectif du livre ?

Michel Sommer : Notre rapport au temps est devenu problématique, comme le dit le philosophe Hartmut Rosa : « Le sentiment général est de courir de plus en vite sans jamais aller nulle part. » Il parle d’« accélération » dans tous les domaines de la vie, qui a de gros impacts. Pourtant, ce sujet est peu thématisé par les chrétiens, dans les prédications, même si l’accélération gagne aussi les Églises. Par un cheminement de méditation et de prière nourri de textes biblique, l’objectif du livre est d’aider à prendre conscience de son propre rapport au temps, de se donner du temps pour la relation avec Dieu, de se mettre à l’écoute intérieure des textes bibliques sur le temps, et ainsi de « retrouver le sens du temps ».

2. Vous êtes cinq auteurs à avoir participé à l’écriture de ce livre, qu’est-ce qui vous a réuni autour de ce thème ?

Jane-Marie Nussbaumer : Un collectif de cinq auteurs ? Ce n’est pas habituel : plus précisément, il s’agit de trois auteurs, une photographe et une personne qui a relu et coordonné ! Ces cinq personnes se connaissent bien, et pour cause ! Elles font équipe depuis 2005. Dès ce moment, à deux exceptions près, elles ont animé ensemble chaque année une retraite au Centre de Formation et de Rencontre du Bienenberg, près de Bâle en Suisse.

Au cours de ces 17 retraites de six jours, chacune des personnes de l’équipe a trouvé sa place selon ses compétences et goûts. C’est donc presque naturellement que deux livres sont issus de ces retraites : le premier paru en 2015 sur la base des retraites de 2005 à 2009 sur les cinq sens. Le titre de ce premier livre est Nos cinq sens à la rencontre de Dieu – Un parcours de méditation et de prière.

Et c’est lors de la retraite de 2019 que le thème du temps a été proposé. Une partie du matériau de ce livre a été reprise et complétée suite à cette retraite dont le thème était « Pour retrouver le sens du temps ». La structure de chaque chapitre correspond au vécu des matinées de la retraite du Bienenberg : un temps de louange, un texte biblique et des impulsions, puis des pistes pour le temps de méditation et de prière qui se vivait en silence.

3. Vous dites dans le livre que nos emplois du temps sont souvent surchargés, que nous courons beaucoup, ou qu’au contraire, nous sommes dans le « trop peu » : quels problèmes le trop, ou le trop peu peuvent-ils causer à notre relation à Dieu ?

Michel Sommer : Le trop d’activités et le trop de sollicitations nous empêchent de vivre une relation profonde avec Dieu, car ce trop nous éparpille et nous fait rester à la surface de la vie. Le trop peu peut conduire à une forme de repli sur soi malsain dont Dieu est absent.

4. Y a-t-il un moment idéal pour démarrer ce livre : à la rentrée, au début de l’été... lors d’un changement de vie ?

Madeleine Bähler : L’important, c’est d’être réaliste dans la volonté et la possibilité de dégager le temps nécessaire pour vivre la retraite dans une continuité raisonnable. Le plus simple, c’est de prendre son agenda et de regarder comment la démarche proposée sur 16 semaines peut être intégrée. Si l’on sait que l’on part en camp pour deux semaines et que les journées vont être remplies et longues, il est peu probable qu’on pourra trouver un espace pour y vivre des moments de prière méditative. Il faudra donc peut-être planifier une pause et prévoir de reprendre lorsque l’on arrive à dégager le temps et l’espace nécessaires pour bien vivre la démarche.

5. Ce livre se présente comme une retraite à vivre chez soi. Est-ce que vous avez des conseils pour bien vivre cette retraite un peu particulière ?

Madeleine Bähler : Le livre est une invitation à vivre une démarche spirituelle personnelle. Des conseils sont donnés dans le livre pour aider et soutenir cette dimension. Il est recommandé de prendre quelques notes pour retenir des éléments de ce qui a été vécu. Cela permet de voir l’évolution du cheminement et les fruits qui mûrissent peu à peu ou alors les éléments qui continuent à poser problème pour les approfondir avec le Seigneur. Se retrouver au terme de chaque étape avec une personne de confiance pour partager les éléments importants de la relecture peut être très utile. Cela lance d’une part un petit défi pour suivre effectivement la démarche et garder le rythme, et cela permet d’autre part des prises de conscience précieuses.Si l’on arrive à dégager une période de retraite pour faire la démarche en parallèle avec d’autres personnes et se retrouver au terme des étapes 2 à 6, c’est certainement un encouragement et un enrichissement. Toutefois, il faut veiller à ne pas faire fi du cheminement personnel avec le Seigneur et à ne pas se contenter d’une discussion purement théorique sur les sujets abordés dans le livre.

6. Au début de chaque chapitre, il y a une photo à regarder, en lien avec le sujet de la semaine. Tout le monde n’est peut-être pas familier avec cela, à quoi nous invitent ces photos ?

Sabine Schmitt : Les photos sont là pour nous permettre d’appréhender le texte avec notre imagination, les images ont été choisies en écho au texte biblique. Contempler la photo avant de lire le texte, se laisser toucher par les formes, les couleurs, la composition, pourrait bien réserver quelques surprises au « regardeur ». Dieu parle aussi par l’image.

7. Que diriez-vous pour encourager quelqu’un de surbooké à prendre le temps de lire ce livre ?

Claire-Lise Meissner : « Respire ! Tu es plus que ta course, plus que tes contraintes et responsabilités ! Tu es aimé, attendu par le Dieu qui désire faire route avec toi. Ose perdre un peu de temps pour renouveler ta force intérieure et découvre ce que tu peux y gagner pour toi-même et en lien avec les autres ».

8. Et à une personne qui trouve que le temps passe trop lentement ?

Madeleine Bähler : Quand on a l’impression que le temps passe lentement, c’est souvent parce que les jours se ressemblent et qu’il y a peu d’évènements particuliers. Faire la retraite proposée permet d’introduire un moment spécial dans la semaine, un rendez-vous avec le Seigneur que l’on peut soigner. En plus, la démarche offre l’occasion de revisiter son rapport au temps et de découvrir d’autres dimensions peut-être négligées ou perdues qui viendront enrichir le quotidien.

9. Que souhaitez-vous au lecteur, lorsqu’il refermera ce livre ?

Claire-Lise Meissner : Lecteur, lectrice, nous te souhaitons d’avoir vécu au fil des semaines des moments de temps « suspendu » avec le Dieu de la Vie qui, étant hors du temps, te rejoint au présent de ton actualité. Que tu puisses être encouragé-e à continuer à te laisser toucher par sa Parole, interpeler par Jésus pour répondre à ses invitations, un petit pas après l’autre, un jour après l’autre, sous l’inspiration du Saint-Esprit. À la fin de cette lecture active, nous espérons que ta soif de rencontrer Dieu ait été désaltérée et creusée tout à la fois ! Que la mémoire de quelques saveurs d’Évangile, de respirations profondes, de consolations reçues renouvellent ta confiance et ton espérance pour poursuive le chemin ici et maintenant, jusque dans l’éternité de l’Amour.        



"Les crises de la foi", un livre à lire ensemble

Une lecture en groupe et avec les auteurs!

Lire le livre “Les crises de la foi. Étapes sur le chemin de la vie spirituelle ” en groupe c’est maintenant possible!

  • En plus de la lecture du livre, 7 soirées sont prévues pour dialoguer avec Louis Schweitzer et Linda Oyer, professeurs de théologie et fondateurs de la formation à l’accompagnement spirituel (ISCAS).

  • Les rencontres ont lieu les mercredis soirs de 20h15 à 21h30 sur Zoom. Le groupe suivre étape après étape les différentes phases de la vie spirituelle telles qu’elles ont été définies par les auteurs.

La formation est gratuite, mais l’inscription obligatoire! Il est possible d’y participer seul ou en couple, ou même en Église!

Dates

Les mercredis à 20h15 - Télécharger le programme

  • 28 septembre : la crise du prophète Élie

  • 12 octobre: l’apôtre Pierre

  • 2 novembre: la crise de François d’Assise

  • 9 novembre: Les phases de la vie spirituelle

  • 23 novembre: La crise et la fécondité

  • 7 décembre: l’incertitude confiante

  • 14 décembre: vivre ensemble la diversité

Télécharger le flyer

Que faire pour s’inscrire?

  1. S’inscrire gratuitement à la formation via ce lien ou en remplissant le flyer à la main et en le retournant par courrier.

  2. Se procurer le livre - le commander depuis la France ou la Suisse

  3. Participer aux soirées sur zoom!

Accorder le pardon

“Puis-je pardonner à celui qui est coupable de la mort de notre enfant ? C'est une entreprise téméraire que d'écrire à ce propos”, souligne Thomas Dauwalter. “C'est la première fois que je parle en détail du processus de pardon en lien avec cet événement. C'est une entreprise téméraire que d'aborder un tel sujet. Pour plus de clarté : je parle en mon nom et pas au nom des membres de ma famille. Ce que je vais dire sur la rencontre avec le responsable de l'accident n’engage que moi ; il pourrait aussi en parler de son côté. Chacun a donné à l'autre la liberté de dire ce qu'il a jugé opportun dans la situation en question. Sur le chemin du pardon, j'ai vécu les étapes suivantes.

Étape 1 : La tragique nouvelle

Le 26 juillet 2004, à trois heures du matin, on sonne à notre porte. Deux policiers et un aumônier d'urgence - comme je le comprendrai plus tard - se tenaient devant la porte. L'un des policiers a la pénible tâche de m'annoncer la terrible nouvelle du décès accidentel de notre fille, Michi :

« Votre fille a eu un accident de la route. Pour faire court, elle n'a pas survécu ! Cause de l'accident : un véhicule arrivant en sens inverse s'est retrouvé de son côté de la route et l'a percutée de plein fouet sur son scooter Vespa. Elle n'a eu aucune chance. L'accident s'est produit sur un pont. L'homme était sous l'emprise d'une forte alcoolémie et a, en outre, commis un délit de fuite. »

Ma vie m’a paru être semblable à une page jusqu'alors blanche et agréable, devenue d'un seul coup, noire et sombre. Les pensées suivantes m’ont envahi : le monde n’est pas bon. Les gens ne me veulent pas du bien. Dieu n'a pas de bonnes intentions à mon égard. Je ne vaux rien, je suis l'idiot de la nation. Et en même temps, une phrase a surgi, à l’opposé de à ce qui se passait. Une phrase que j'avais lue, il y a des années, dans le petit livre de Fritz Schwarz: Ich werweigere mich – oder von der Schönheit des Glaubens (Le refus de se soumettre ou la beauté de la foi), m'avait déjà interpellé à l'époque : « La beauté de la foi chrétienne ne peut pas être décrite. Je pourrais devenir fou, fou de joie. » Un paradoxe criant ! C'est possible, me suis-je dit. Cela m’a rendu pensif. Cette phrase est devenue un cri du cœur :

« Jésus, j'aimerais pouvoir à nouveau parler de la beauté de la foi. Avec conviction. Et de telle sorte que je ne doive pas faire abstraction de cette expérience amère, mais qu'elle soit assimilée ! »

Étape 2 : Protestation et déni

Impuissants et abasourdis, nous étions assis à table. Le choc, le désespoir, la tristesse, l'impuissance, la paralysie, le mutisme, des pensées comme « ce n’est pas possible, c'est un cauchemar » ont continué à hanter mes jours, mes semaines et les mois suivants. Mais il y avait aussi une résistance intérieure :

« Je ne vais pas laisser une personne responsable de la mort de notre enfant gâcher ma vie. Je refuse qu'une racine d’amertume détruise ma vie. Je refuse de chercher à me venger. Et je refuse que le deuil devienne ma raison de vivre. Je veux apprendre à accepter cet événement terrible. Oui, il doit faire partie de ma vie. Une partie de mon histoire avec Dieu et non un chapitre sombre mis à part. Je dois apprendre à me réconcilier avec ce chapitre de ma vie. Je veux aussi me réconcilier avec Dieu. Pour y parvenir, le pardon est une grande partie du chemin. »

Je veux vouloir pardonner à cette personne. Mais comment faire ? Comment pardonner dans un tel cas ? Nous avons l’habitude de prier :

« Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. » (Mt 6.12).

Étape 3 : Questions sur questions

Qui est vraiment responsable de la mort de notre Michi ? Le responsable de l'accident ? Ou même Dieu ? N'aurait-il pas pu l'empêcher ? J'étais tiraillé. À cela s'ajoutait le magnifique Psaume 121 que Michi avait écrit dans sa chambre en guise de profession de foi. La question surgissait inévitablement en moi : « Où étais-tu, Dieu ? » Des questions toutes simples ont jailli en moi.

J'ai également constaté qu'il n'y avait pas de système judiciaire objectif dans notre pays. Nous avons reçu 3000 € de dédommagement. Qu'est-ce pour une vie ? Qu’est-ce qu’on peut faire avec cet argent ?

À l'époque, j'ai lu dans le journal que Stefan Raab avait été condamné à payer 70.000 € de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée, suite à des plaisanteries grossières aux dépens d'une écolière. Il avait utilisé le nom d’une jeune fille de 16 ans, Lisa Loch (note de traduction : Lisa Trou), de manière répétitive pour des jeux de mots douteux.

Au final, j'ai compris au fond de moi qu'il n'y avait pas de justice objective. Culpabilité ici, punition là. Affaire classée. Est-ce ainsi que l'on empêche d'autres délits ? Je ne plaide pas pour que la dette soit exemptée de conséquences. Que dirait Dieu : Oui, il y a ici une dette inestimable et irréparable. La réponse est le pardon, au moment voulu et si possible, la réconciliation et le rétablissement des relations. La victime et le coupable se rencontrent. Le rapport à la faute est un puissant moteur de guérison et d’élan de vie. La vengeance a un inconvénient : elle provoque à nouveau la vengeance. Et cela ne s'arrête jamais. Dans les grandes comme dans les petites choses.

Étape 4 : Que faire de mon agressivité ?

Comment gérer mon agressivité envers le coupable ? Celle-ci réapparaissait de manière sporadique. Elle n'était pas particulièrement prononcée, mais il y avait toujours quelque chose qui était là.

Une déclaration de Paul, un homme de la Bible au temps de l’Église primitive, m'a toujours été d'une grande aide : je n'ai pas besoin de me venger. C'est un autre qui s'en charge :

« Ne vous faites pas justice vous-mêmes, bien-aimés, mais laissez place à la colère, car il est écrit : C’est moi qui fais justice ! C’est moi qui paierai de retour, dit le Seigneur. » (Rm 12.19).

La vengeance peut donc être déléguée à celui qui est le Juste.

En plus, je me souvenais de l'histoire de Caïn et Abel, le premier meurtre décrit dans la Bible. Caïn a tué son frère Abel par jalousie. Il l'a assassiné. À un moment donné, Dieu s'approche de lui avec cette question choquante : « Caïn, où est ton frère ? » Caïn pensait que le cas d'Abel était réglé. Mais il y avait quelqu’un qui n'avait pas oublié. C'était Dieu et il demanda à Caïn : « Où est ton frère ? »

Le sang d'Abel s'était infiltré dans la terre depuis longtemps. QUELQU’UN n'avait pas oublié. Une image s'est formée en moi. Si la tache de sang sur la route de Mahlspüren s'est infiltrée depuis longtemps, si un jour la route n'existe plus et si peut-être même Mahlspüren disparaît, quelqu'un ne va pas oublier. Un jour, il demandera au responsable de l'accident :

« Qu'as-tu fait cette nuit-là ? Tu as laissé la fillette sur place ! Est-ce que tu t'es présenté chez les parents pour leur demander pardon ? »

Cette pensée m’a réconforté un certain temps. Au même moment, je commençais à avoir de la peine pour le responsable de l'accident. J'imagine que le fait d'être confronté à Dieu est très dangereux. Et c'est alors qu'une autre déclaration de la Bible a revêtu une beauté particulière :

« J’entendis du trône une voix forte qui disait : La demeure de Dieu est avec les humains ! Il aura sa demeure avec eux, ils seront ses peuples, et lui-même, qui est Dieu avec eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux, la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu. »  (Ap 21.2-4).

Michi s'était fait baptiser trois semaines avant son accident. Plus tard, j'ai commencé à me renseigner sur l'accident et à prier son auteur : « Père, aie pitié de lui et donne-moi l'inspiration pour l'affronter avec clarté et réconciliation. » Le dernier livre de la Bible, l'Apocalypse, est devenu à cette époque un véritable livre de consolation, ce qui est d'ailleurs l'intention centrale de ce livre. C'est à peine croyable !

Étape 5 : Dieu m'a pardonné, je vais donc aussi pardonner.

Je voulais pardonner à l’auteur de l'accident et le lui faire savoir d'une manière ou d'une autre. Ma motivation n'était toutefois pas claire : pour me protéger de l'amertume ? Pour obéir à Dieu ? Pour être un bon chrétien ? Pour passer pour un super-chrétien devant les autres ? Une chose est sûre : les réflexions sur le pardon ont surtout porté sur moi-même ! Au cours de la première année après l'accident, j'ai essayé d'obtenir un rendez-vous par l'intermédiaire d’une tierce personne. Le contact n'a pas eu lieu. Et c'est bien ainsi. À ce moment-là, j'avais pardonné en prenant de haut le coupable :

« Moi, bon chrétien, je te pardonne, pauvre responsable de l'accident. Nous autres chrétiens, nous avons de si nobles sentiments. »

Bof, bof… Aujourd’hui je pense que ce sont des réactions médiocres. Les années passèrent ainsi. J'étais relativement en paix avec tout cela, mais j'avais en quelque sorte le désir de ne pas me contenter d'un pardon intérieur. Il devait y avoir plus, mais je ne savais pas quoi. Peut-être que la réconciliation était aussi possible !

Étape 6 : La percée

Le tournant s'est produit pendant les vacances d'été 2012 : sur la plage ensoleillée de Cavallino, j'ai lu le livre de Miroslav Volf, Free of charge – Giving and Forgiving in a Culture Stripped of Grace (Donner et pardonner gratuitement dans une culture sans pitié) de Miroslav Yolf. Ce livre est le meilleur que j’aie jamais lu sur le thème du pardon. Je n'ai pas pu m'empêcher de laisser libre cours à mes larmes sur ma chaise longue. Des phrases ont touché mon cœur :

« Dieu est le plus miséricordieux. Le pardon est un cadeau spécial. Lorsque nous le donnons, nous cherchons le bien d'une autre personne et non le nôtre. Dieu a inventé le pardon. Notre pardon n'est qu'un écho du pardon de Dieu. Nous pardonnons en tant que pécheurs et non en tant que justes. Dans le pardon, il y a deux vainqueurs. »

Un nouveau désir est né en moi : je veux rencontrer cet homme, lui parler et lui dire que je lui ai pardonné. Je souhaite que la paix ne soit pas seulement pour moi, mais pour lui aussi. Je souhaite qu'il réussisse sa vie. Dieu avait beaucoup agi en moi. Vint alors le moment d'établir le contact. Comment pouvais-je m'y prendre ? J'en ai parlé à Dieu et, peu avant Noël 2012, une pensée forte a surgi en moi :

« Thomas, demande à cet homme comment il se sent après tous ces événements au goût amer. Demande-le-lui, toi ! »

Je n'avais encore jamais vu les choses sous cet angle. C’était une mise en perspective. Je me suis assis et je lui ai écrit une lettre. La culpabilité devait être mentionnée. Le verdict de culpabilité précède le pardon, dit Volf, sinon tout devient bon marché. J'ai donc écrit quelques lignes :

« Bonjour Monsieur ..., je m'appelle Thomas Dauwalter et je suis le père de Michi Dauwalter, dont vous êtes coupable de la mort accidentelle. Je me demande continuellement comment vous vous sentez ! C'est avec plaisir, même si j’ai les genoux qui tremblent, que je vous rencontrerais et vous tendrais la main vers le pardon. Avec mes meilleures salutations, Thomas Dauwalter. »

Étape 7 : La rencontre

Ce fut une journée hors norme. Inscription dans mon journal de bord du 20 février 2013 :

« Trio de prière, bureau, une journée mémorable : accident de voiture - dommage total ! Rencontre avec le coupable de la mort accidentelle de Michi. Seigneur, je te remercie parce que tu es un Seigneur plein de bonté et que tu permets la paix sur la terre. »

La rencontre était prévue pour 20 heures. Je me suis mis en route pour aller chez moi vers 13 heures pour avoir encore un peu de temps pour me reposer un peu et pour prier. Intérieurement, j'étais déjà dans la rencontre, brutalement, je me suis réveillé de mes dialogues intérieurs : bang ! La voiture s'est arrêtée d’un coup. Je venais de m'écraser contre un lampadaire à Bambergen ! Première pensée : j'annule l’entretien. La seconde : c’est maintenant plus que jamais. Je ne suis pas sûr de savoir dans quelle mesure le diable, qui est le diviseur, a voulu empêcher cette rencontre imminente et salutaire.

Le soir, nous nous sommes rencontrés. Au premier contact visuel, j'ai eu très peur. Que va-t-il se passer ? Est-ce que je vais pleurer ? Une agressivité insoupçonnée allait-elle se manifester ? C'est ainsi que nous nous sommes rencontrés. L'homme est à peine plus jeune que moi. D'une certaine manière, il est même sympathique. Nous avons commencé par la question que j'avais posée dans la lettre :

« Comment vous sentez-vous en tant que responsable d'un accident, en tant que personne coupable de la mort d'une jeune femme ? »

« Cette question », m'a-t-il dit, « m'a coupé l'herbe sous le pied quand je l'ai lue sur votre carte ! Vous me posez la question alors qu’en fait, je voulais vous la poser depuis longtemps. Comment se fait-il que vous me posiez la question ? » L'échange a été très émouvant. Les raisons pour lesquelles le premier contact m'a été refusé ont également été évoquées : « La peur », a-t-il dit, « j'ai eu peur que vous sortiez un couteau ou un pistolet lors de la rencontre. » En effet, un peu à la même période que l’accident, avait eu lieu l'assassinat d’un contrôleur aérien par le père d'une victime d’un crash. C'est à cette époque qu'a eu lieu la terrible collision d'avions près d'Überlingen, qui a coûté la vie à de nombreuses personnes, dont de nombreux enfants. Nous avons parlé ensemble pendant 90 minutes, quelques larmes ont coulé. Puis nous nous sommes quittés.

« Vous m'avez enlevé une tonne de poids du cœur. Je peux à nouveau respirer. »

Ces mots prononcés au moment des adieux me sont restés en mémoire. Cette expérience m'a fait prendre conscience de l'importance du pardon. Il s'agit de briser le cycle de la vengeance. Et il n'y a pas d'autre voie que le pardon et la réconciliation. Il s'agit de rendre possible la vie en commun. Le pardon signifie qu'à l'avenir, je veux rencontrer cette personne comme un être humain normal et non pas comme « Monsieur le coupable de la mort de notre Michi ». Dieu me pardonne de la même manière. Il ne me voit plus comme un coupable, mais comme quelqu'un qui a été pardonné, pour la faute duquel un autre a payé le prix. C'est pourquoi, en tant que chrétien, je ne peux pas faire autrement que de pardonner si quelqu'un est coupable à mon égard. Il faut ne pas balayer la faute sous le tapis, à bon compte, mais l'appeler par son nom, puis accorder consciemment le pardon, détacher l'autre de sa culpabilité et lui donner une nouvelle chance. Autrement, nous n’avons aucune possibilité de faire face à notre propension à l'erreur et à la culpabilité mutuelle. Tout le reste conduit à un cercle vicieux destructeur, selon la devise « ce que tu me fais, je te le fais ». Si tu veux être heureux un instant, venge-toi. Si tu veux être heureux toute ta vie, pardonne.

Ce soir-là, après la rencontre et la poignée de main de réconciliation, je suis rentré chez moi profondément satisfait en pensant :

« Aujourd'hui, j'ai enfin fait quelque chose qui a vraiment du sens. Mon Dieu, tu es vraiment génial. »

Il y a quelques semaines, la boucle a été bouclée. Monsieur Z. a, à ma demande, rénové et remis en place la croix sur le lieu de l'accident. Un signe précieux de repentir et aussi de réparation. Cela m'a fait un bien fou ! Plus tard, j'ai reçu une demande d'amitié de sa part via Facebook. J'ai dû déglutir une nouvelle fois avant de répondre « oui » quelques jours plus tard. Nous nous sommes rencontrés à nouveau sporadiquement.

Je conclurai par une phrase de Desmond Tutu :

« Les expériences difficiles ont le potentiel de nous rendre amers ou d'ennoblir notre caractère. »

Nous pouvons vivre la réconciliation et le salut par Jésus dans ce monde, non pas malgré nos blessures, mais justement à cause d'elles. Oui, la beauté de la foi chrétienne se manifeste précisément dans ces contradictions et ne peut guère être décrite.


Thomas Dauwalter, né en 1959, pasteur de l’Église évangélique néo-anabaptiste Lindenwiese, Überlingen (D). Traduction par Rachel Parlebas Nussbaumer. Publié en allemand dans Mennonitisches Jahrbuch 2022, p. 85-90, repris avec autorisation.

Dieu et la pandémie

Nous vivons dans l’ombre de la pandémie depuis plus d’une année, situation qui touche l’ensemble de nos vies, de nos activités, de nos Églises, du travail pastoral. Beaucoup de questions se posent :

  • Pourquoi?

  • Qu’est-ce que cela signifie?

  • Quelle est notre réponse?

  • Quelle est la réponse de l’Église ?

La pandémie nous rappelle notre fragilité et notre mortalité.

Depuis plusieurs générations en Europe occidentale, nous vivons un contexte plutôt exceptionnel dans l’histoire de l’humanité. Pour la grande majorité, nous avons une couverture médicale, nous n’avons pas faim, nous n’avons pas connu de conflit armé sur notre sol, le progrès technique facilite la vie et le travail, nous vivons plus longtemps que jamais dans l’Histoire. Nous pensions maîtriser la vie. Nous appuyons sur l’interrupteur, et il y a de la lumière, nous ouvrons le robinet et il y a de l’eau potable, nous prenons la voiture, le train ou l’avion et nous nous déplaçons facilement.

Et tout à coup, nous sommes face à la maladie et à la mort sur le plan mondial, nous ne pouvons plus nous voir aussi facilement, nous perdons des membres de famille et des amis, certains perdent le travail, tout est bousculé sinon bouleversé.

Mais nous ne vivons pas en Syrie, en Afghanistan, en Inde, dans l’Est du Congo. Une bonne partie de l’humanité vit des situations plus difficiles depuis longtemps. Nos parents, nos grands-parents ont connu les guerres mondiales, la grande crise économique, moins de médicaments, la grippe espagnole. Les pandémies courent depuis toujours, c’était jusqu’à très récemment des phénomènes récurrents et mortels. N’oublions pas que dans le contexte mondial actuel, nous restons privilégiés même si nous posons des questions.

Qu’est-ce que cela signifie?

Beaucoup de réponses en ce qui concerne la pandémie : on sous-estime, on surestime, on cherche les responsables, c’est la faute de la Chine, c’est la faute de notre irresponsabilité écologique, c’est la faute de nos dirigeants.

Pour certains chrétiens, c’est un signe. Un signe de la fin des temps, un signe de la colère de Dieu, c’est une punition : pour le péché sexuel, pour l’injustice entre riches et pauvres, pour la surconsommation et le niveau de vie occidental. Parfois la pandémie fonctionne comme un mégaphone, nous permettant de crier plus fort ce que nous avions de toute façon envie de dire.

La recherche de signes pose la question de notre manière de lire et de comprendre l’Histoire. Il est vrai, Jésus évoque et donne des signes, mais il a aussi dit « personne (même le Fils) ne sait l’heure ». Dans Matthieu 24, il dit même qu’il ne faut pas s’inquiéter.

Vous allez entendre parler de guerres et de rumeurs de guerre. Attention ! Ne vous alarmez pas : il faut que cela arrive, mais ce n'est pas encore la fin. (Mt 24,6)  

La description des efforts des chrétiens de lire la fin dans les événements de l’histoire rempliraient des volumes et des volumes. Comment donc comprendre les « signes » ?

Alors quelques scribes et Pharisiens prirent la parole : « Maître, nous voudrions que tu nous fasses voir un signe. »

Il leur répondit :

« Génération mauvaise et adultère qui réclame un signe ! En fait de signe, il ne lui en sera pas donné d'autre que le signe du prophète Jonas. Car tout comme Jonas fut dans le ventre du monstre marin trois jours et trois nuits, ainsi le Fils de l'homme sera dans le sein de la terre trois jours et trois nuits. (Mt 12,38-40)

Plutôt que de chercher des signes dans les journaux et les événements, j’aimerais suggérer que nous avons à lire les événements à la lumière du signe de Jonas, c’est-à-dire, le signe, la réalité de la croix et de la résurrection. L’histoire a un sens, mais elle est à lire à partir du Christ, à partir des réalités fondamentales de l’Évangile. La vie, la mort et la résurrection du Christ, le cœur du projet de Dieu pour la bénédiction de toutes les familles de la terre.

 Aujourd’hui, nous ne sommes pas loin du week-end de Pâques. Le vendredi saint et la croix nous rappellent la réalité du mal, le dérèglement de notre monde par le péché. Ces forces ont tout simplement cherché à supprimer le Fils. La croix, c’est l’attaque des forces du mal pour éradiquer le Christ.

 Autrement dit, nous ne devrions pas avoir besoin de signes comme la pandémie pour nous rappeler que notre monde est déréglé, que nos relations sont déréglées, que l’économie, la politique, l’écologie montrent les efforts du mal à conquérir l’Histoire.

L’ensemble de l’Écriture nous dit que le mal est complexe et que nous ne pouvons pas facilement l’expliquer. Parfois, je subis les conséquences directes de mon comportement, il y a parfois un lien évident entre mon péché et ce qui m’arrive. Parfois, nous subissons le mal commis par les autres, et ce n’est pas directement de notre faute. Les méchants prospèrent et les innocents trinquent. Est-ce qu’on va dire que l’enfant syrien qui meurt de Covid dans un camp de réfugiés est responsable d’avoir attrapé cette maladie ? Parfois, dans la Bible, par exemple dans le cas de Job, le mal est une épreuve que Dieu permet pour tester la fidélité et montrer sa souveraineté. Étant tous pris dans le cycle infernal du mal, nous ne devrions pas être trop rapide à proclamer « à qui la faute ». On est tous impliqué d’une manière ou d’une autre.

 Quelle est notre réponse?

Je soulève plusieurs pistes. D’abord, les Psaumes. Le peuple d’Israël est souvent confronté au mal. Parfois, c’est de sa faute (l’exil), parfois, ce n’est pas de sa faute (l’esclavage en Égypte), parfois, c’est tout simplement incompréhensible. Dans 33% des Psaumes nous trouvons la plainte. Face au dérèglement, le peuple s’adresse honnêtement à Dieu.

Tu nous livres comme agneaux de boucherie, tu nous as dispersés parmi les nations.  Tu cèdes ton peuple sans bénéfices, et tu n'as rien gagné à le vendre.

Tu nous exposes aux outrages de nos voisins, à la moquerie et au rire de notre entourage.

Tu fais de nous la fable des nations, et devant nous les peuples haussent les épaules.

Tous les jours, j'ai devant moi ma déchéance, et la honte couvre mon visage, sous les cris d'outrage et de blasphème, face à un ennemi revanchard.

Tout cela nous est arrivé, et nous ne t'avions pas oublié, nous n'avions pas démenti ton alliance ; notre cœur ne s'était pas repris, nos pas n'avaient pas dévié de ta route, quand tu nous as écrasés au pays des chacals et recouverts d'une ombre mortelle. (Ps 44,12-20)

Jusqu'à quand SEIGNEUR ? Te cacheras-tu constamment ? Laisseras-tu flamber ta colère ?

Pense à ce que dure ma vie : tu as créé l'homme pour une fin si dérisoire !

Quel homme vivrait sans voir la mort, échappant à l'emprise des enfers ?

Seigneur ! où sont tes bontés d'autrefois ? Tu avais juré à David sur ta fidélité !

Seigneur ! pense à tes serviteurs outragés, à tout ce peuple dont j'ai la charge.

Tes ennemis l'ont outragé, SEIGNEUR ! en crachant sur les pas de ton messie (Ps 89,47-52)

Nous pouvons faire de même. Nous pouvons poser nos questions difficiles à Dieu, nous pouvons lui dire que nous ne comprenons pas. La plainte est permise, voire nécessaire, mais ce n’est pas le dernier mot. C’est une étape de notre réponse, de notre lecture de l’Histoire humaine. Le Psaume 89 que je viens de citer, se termine de la manière suivante :

Béni soit le SEIGNEUR pour toujours ! Amen et amen ! (Ps 89,53)

Dans le signe de Jonas, il y a la croix qui nous rappelle l’existence et le sérieux du mal. Mais le dernier mot est la résurrection et la victoire sur le mal. Et nous avons ici la deuxième clé de lecture de l’histoire. La croix et la résurrection nous montrent la manière dont Dieu fait face au mal. Le Christ reste fidèle, il n’entre pas dans le jeu de la domination, de la vengeance, de la violence. Il reste dans la volonté de Dieu, il reste fidèle à ce qui lui-même avait enseigné dans le Sermon sur la montagne. Il nous montre ce que l’amour de Dieu est prêt à subir pour nous sauver.

Il est sorti du tombeau, il est monté à la droite de Dieu et toute autorité lui a déjà été donnée. C’est à partir de là que nous répondons au mal, à la pandémie, c’est la clé de notre compréhension du monde et le moteur de notre action.

Ici, les récits de Pâques dans l’Évangile de Jean peuvent nous aider. On pourrait dire qu’après la crucifixion, les disciples se confinent.

Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine, alors que, par crainte des Juifs, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées. (Jn 20,19)

Les disciples ne comprennent pas ce qui est arrivé, ils ont peur, et ils ferment les portes. Nous, par crainte du virus, nous nous trouvons confinés. Mais c’est dans une telle situation que le Christ se manifeste.

Jésus vint, il se tint au milieu d'eux et il leur dit : « La paix soit avec vous ». (Jn 20,19)

Le Christ ressuscité offre la paix à ceux qui ont peur, à ceux qui se trouvent enfermés. Et dans ces mêmes conditions, Jésus confie une mission à ces disciples.

Alors, à nouveau, Jésus leur dit :

« La paix soit avec vous. Comme le Père m'a envoyé, à mon tour je vous envoie. » (Jn 20,21)

Et pour cela, il les équipe avec le Saint Esprit. Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : « Recevez l'Esprit Saint » (Jn 20,22) La mission de l’Église commence dans le contexte des larmes des femmes dans le jardin, des disciples qui ont peur, qui doutent et qui sont enfermés.

Quelle est la réponse de l’Église?

Et c’est ici, dans cet envoi, dans cette mission que nous trouvons la réponse à la question des signes. Les disciples sont envoyés comme le Christ a été envoyé. Comme le Père m’a envoyé, je vous envoie. Comme, c’est-à-dire de la même manière. Face au mal, face au dérèglement, Dieu est venu parmi nous en Christ et le Christ a posé des signes.

D’abord, il a partagé entièrement notre humanité. Il a eu faim, il a connu la tentation, il pleure lorsque son ami Lazare décède, et il a connu la souffrance et la mort. Comme remède, Dieu vient parmi nous partager notre vie. Et ce même Jésus, envoyé par le Père, Parole faite chair, a posé des signes.

La résurrection ouvre le chemin vers la nouvelle création dont parle l’Apocalypse, la création brisée, que Dieu va guérir et restaurer. Et les signes posés par Jésus étaient des signes de cette nouvelle création. Signes d’une vie nouvelle, Dieu venant dans l’ordinaire et faisant l’extraordinaire. Guérir les malades, changer l’eau en vin, donner du pain à ceux qui avaient faim, donner la vue aux aveugles, l’ouïe aux sourds, manger avec des personnes de mauvaise réputation, pardonner les péchés, dénoncer le mal, appeler à la repentance, ce qui veut dire qu’une autre vie est possible. Des signes d’un monde nouveau, des signes du monde vers lequel l’Histoire chemine.

La croix et la résurrection sont à la fois la source de notre rédemption et le modèle de notre action dans un monde déréglé par le mal. Dieu a envoyé Jésus, Jésus envoie les pauvres en esprit, les doux, les affamés de justice, les miséricordieux, les cœurs purs les artisans de paix.

N.T. Wright décrit la mission des disciples de la manière suivante : apporter l’amour de Dieu là où le monde a mal, être un peuple en prière au milieu d’un monde qui a mal. Il dit aussi que nous pouvons, devons apporter nos plaintes à Dieu. Mais une fois que c’est fait, au lieu de poser la question de « pourquoi » ou « à qui la faute », poser plutôt celle de savoir « que pouvons-nous faire ? »

Dans Actes 11, l’Église d’Antioche apprend qu’il y aura une famine, c’est-à-dire qu’il y aura des gens qui risquent de mourir. Cette Église ne dit pas « c’est un signe de la fin », elle ne dit pas, « l’empereur aurait dû faire des stocks », même si le texte donne le nom de l’empereur. Elle pose la question de savoir « que pouvons-nous, que devons-nous faire ? » Quelle réponse à une catastrophe annoncée ?

Les disciples décidèrent alors qu'ils enverraient, selon les ressources de chacun, une contribution au service des frères qui habitaient la Judée. Ce qui fut fait. L'envoi, adressé aux anciens, fut confié aux mains de Barnabas et de Saul. (Actes 11,29-30)

 Sachant que des sœurs et des frères auront faim, ils décident de faire une collecte et ils désignent des responsables. Les épîtres de Paul nous montrent à quel point cette collecte était importante. Des Églises de partout ont pris soin de chrétiens qu’ils ne connaissaient pas. Elles ont posé le signe d’un monde fraternel et solidaire, du monde tel que Dieu le veut, tel qu’il sera.

Au milieu de nos craintes, lorsque nous nous trouvons confinés, le Christ se fait connaître, et il nous confie la même mission : comme le Père m’a envoyé, moi, je vous envoie. Soyons de ceux et celles qui apportent l’amour et le pardon de Dieu là où notre monde a mal, là où notre monde souffre.

 

 

Cette méditation de Neal Blough s’inspire de sa lecture du livret de N.T. Wright, God and the Pandemic : A Christian Reflection on the Coronavirus and its Aftermath, Zondervan Reflection, 2020.

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L'oecuménisme, une question débattue

Avant chaque journée Points chauds, un exercice préparatoire est donné aux participants pour se préparer à ce qu’ils vont entendre. La prochaine journée traitera de l’œcuménisme. La consigne? Regarder la vidéo ci-dessous et répondre aux deux questions ci-dessous. Et vous qu’en dites vous?

L’œcuménisme

Conférence de Campus protestant : Les mots de la foi
Idée de Antoine Nouis et Jean-Luc Mouton. Présenté par Gérard Rouzier

Plusieurs raisons (secondaires) plaident en faveur de l’œcuménisme :

  • L’esthétique : L’unité est préférable à la division.

  • L’évangélisation : Les divisions sont un contre-témoignage.

  • Le souci pastoral : Il y a de nombreux couples interconfessionnels dans nos Églises.

Raison fondamentale : L’œcuménisme est une exigence spirituelle

Les différences appartiennent à la création. Elles sont dans le monde, nos Églises, nos familles, etc.

Face à ces différences, il y a deux péchés à éviter :

  • L’uniformité : Nier la diversité en voulant que tout le monde soit pareil. Un des Pères de l’Église, Basile de Césarée, a dit : « C’est la même eau fraîche et féconde qui tombe sur le champ afin que fleurissent rouge le coquelicot, rose la rose et bleu le bleuet. »

  • L’indifférence : Désinvolture qui consiste à ignorer ceux qui sont différents de nous et à croire que nous n’avons pas besoin les uns des autres.

Entre ces deux écueils, l’œcuménisme cherche une juste relation entre les Églises.

Trois formes d’œcuménisme :

  • L’œcuménisme théologique : Travail sur les vraies et les fausses différences. Il cherche à rapprocher les positions et à se mettre d’accord sur les désaccords.
    Cet œcuménisme est important mais arrive un moment où les désaccords sont irréductibles et indépassables sauf à demander à une Église de renoncer à ce qui est pour elle fondamental.

  • L’œcuménisme de l’hospitalité : Démarche spirituelle qui prend en compte les différences, et qui cherche à accueillir et à aimer ce qui fonde ces différences. Œcuménisme qui consiste à s’inviter et se visiter les uns les autres. (Hébreux 13.1 : « N’oubliez pas l’hospitalité, il en est qui en l’exerçant, ont à leur insu, loger des anges.»)

  • L’œcuménisme de l’objection : Il ne s’agit pas seulement d’accueillir les différences, mais de demander à chacun de formuler les objections qu’il adresse à l’autre. Cela repose sur l’idée que chaque Église permet à l’autre d’éviter de tomber du côté où elle penche.
    Le protestantisme peut aider l’֤Église catholique à se préserver d’un absolutisme qui la menace. Le catholicisme rappelle au protestantisme que la théologie a une histoire, et que l’Église est universelle.

Exemple biblique : Dans l’épître aux Galates (chapitre 2), Paul parle de la grande question qui se posait à la première Église : la cohabitation entre les juifs et les non-juifs : fallait-il marquer cette différence et avoir des Églises séparées ? Ou abolir les différences ?
La question a été traitée à la rencontre de Jérusalem.
Après avoir évoqué les deux positions, Paul termine ainsi : « Lorsque Jacques, Céphas et Jean (chefs de l’Église) ont reconnu la grâce qui m’avait été accordée, alors ils nous ont donné la main droite à Barnabé et à moi en signe de communion. Nous irions nous vers les non-juifs, et eux vers les circoncis. Nous devions seulement nous souvenir des pauvres, ce que je me suis empressé de faire. »

Trois éléments dans ce texte peuvent inspirer le dialogue œcuménique :

  • Évoquer les différences : Paul aurait pu poursuivre sa mission sans se soucier de ceux qui n’étaient pas d’accord avec lui. Il a tenu à aller à Jérusalem pour les rencontrer et exposer sa position. Lorsque la différence est apparue irréductible, ils ont décidé de partir chacun de leur côté.

  • Se séparer en se donnant la main droite. Le signe est éloquent : tendre la main droite, c’est refuser de se séparer sans se donner mutuellement un signe de paix. Le geste a des allures d’une bénédiction « Que Dieu t’accompagne sur ton chemin ».

  • Faire ensemble tout ce qui est possible. Ne pas être d’accord sur les prescriptions du judaïsme n’empêche pas de s’occuper ensemble des pauvres.

Ce passage propose un chemin pour les relations entre les Églises :

  • Éclaircir les différences pour repérer celles qui sont irréductibles.

  • Honorer ces différences tout en appelant la bénédiction de Dieu sur les autres Églises.

Faire ensemble tout ce qu’on n’est pas obligé de faire séparément, notamment l’action sociale.

Merci à Jane-Marie Nussbaumer pour la retranscription de la vidéo.




Comment réagis-tu à cette vidéo ?

  • Plutôt d'accord ? Pourquoi ? Essaie de formuler 2 raisons.

  • Plutôt pas d'accord ? Pourquoi ? Essaie de formuler 2 raisons.





















(Re-)découvrir le Sermon sur la Montagne depuis son salon

En période de pandémie, il est difficile de se projeter et d’envisager des déplacements ainsi que des rencontres avec de grands groupes. Le FREE COLLEGE et le Centre de formation proposent d’approfondir un texte qui est au centre de l'enseignement de Jésus depuis son fauteuil, une tasse de thé à la main.

Une occasion unique de découvrir Jésus dans une autre perspective!

Orateur

Claude Baecher, ancien pasteur des Églises mennonites et de la FREE et spécialiste de la question.

Quand

Tous les mercredi soirs à 20h15 du 2 janvier au 26 mai 2021.

Lieu

Depuis chez vous, sur Zoom.

Support matériel

Claude Baecher participera à la soirée en tant que consultant.

Prix

La participation à ces animations bibliques est gratuite, mais une inscription est nécessaire pour obtenir le lien à la connexion ZOOM. Ces soirées seront animées conjointement par Serge Carrel, journaliste, et par un pasteur d’une des Églises partenaires.


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Programme

1.      6 janvier : « Introduction au Sermon sur la montagne » (Mt 4.23-5.2)

2.      13 janvier : « Heureux ! » (les Béatitudes) (Mt 5.3-12)

3.      20 janvier : « Sel et lumière » (Mt 5.13.16)

4.      27 janvier : « Jésus et la loi » (Mt 5.17-20)

5.      3 février : « Priorité à la réconciliation » (Mt 5.21-26)

6.      10 février : « Pour des relations saines entre hommes et femmes » (Mt 5.27-32)

7.      17 février : « Parler sans tromper » (Mt 5.33-37)

8.      3 mars : « Comment faire face à la malveillance » (Mt 5.38-42)

9.      10 mars : « La spiritualité du Royaume » (L’amour de l’ennemi) (Mt 5.43-48)

10.   17 mars : « Une spiritualité centrée sur Jésus ou sur soi-même » (Mt 6.1-6 et 16-18)

11.   24 mars : « L’antidote à la prière païenne : le Notre Père » (Mt 6.7-15)

12.   31 mars : « Une manière révélatrice d’engager ses biens » (Mt 6.19-24)

13.   21 avril : « La peur de manquer et le Royaume de Dieu » (Mt 6.25-34)

14.   28 avril : « Contre le moralisme dévastateur » (Mt 7.1-5)

15.   5 mai : « Pas de contrainte, mais confiance en Dieu » (Mt 7.6-11)

16.   12 mai : « Contre les interprétations égoïstes et la course à la réussite » (Mt 7.12-14)

17.   19 mai : « Contre la boulimie du surnaturel et la recherche du sensationnalisme » (Mt 5.15-23)

18.   26 mai : « Contre les brasseurs d’idées justes qui en restent là » (Mt 7. 24-29)

Inscriptions et informations supplémentaires

Sur le site de la Free (lien ici).

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« Je ne lis plus ma Bible. Je la connais. »

« Je ne lis plus ma Bible. Je la connais. Il n’y a rien de nouveau pour moi. »

Ces paroles, dites récemment par une chrétienne, m’ont interpelée. C’est comme si elle me disait, « Je n’ai pas besoin de lire ce bouquin, car je connais la fin de l’histoire ».

J’ai l’impression qu’une partie des personnes de nos Églises n’a pas de contact personnel avec les Écritures en dehors du dimanche matin. Cela peut sembler paradoxal à une époque où nous disposons de nombreuses traductions de la Bible. (Le fait de posséder une Bible est relativement récent dans l’histoire du christianisme.) Par ailleurs, nous pouvons avoir avec nous en permanence plusieurs versions de la Bible dans notre Smartphone.

S’il est plus facile de lire la Bible à notre époque, pourquoi sa lecture semble-t-elle diminuer ?

Il me semble qu’Internet a induit un changement dans notre manière de lire et même de traiter l’information. Sur le web, nous sommes face à une quantité phénoménale et croissante de données. Une recherche sur Google nous donne, par exemple, plus de 800 000 résultats en 43 secondes. Et à chaque lien, à chaque clic, tout un univers d’informations s’ouvre à nous. Avec la multiplication de livres, courriels, SMS, sites Internet, revues, journaux, nous subissons une véritable surcharge d’information, « l’infobésité ».


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Il existe une telle augmentation d’information que nous n’avons pas le temps de tout lire ni la capacité de tout assimiler. Alors, quand nous lisons un texte quelconque, nous le traversons le plus rapidement possible, souvent en diagonale. Nous le parcourons à la recherche de l’information qui nous aidera à mieux fonctionner dans notre monde. Nous sommes dans une mentalité « d’information » et « de fonctionnalité »… prenant ce qui nous sert immédiatement. Internet nous donne l’impression que le but de la lecture, c’est une accumulation de connaissances, avec la découverte de la dernière nouveauté.

Quitter le mode informatif pour apprendre à méditer la Bible

Malheureusement, nous transposons parfois cette manière de lire au texte biblique. Nous feuilletons des passages à la recherche d’un nouvel éclaircissement, d’une nouvelle information ou connaissance. Et nous arrivons à ces phrases, « Je ne lis plus ma Bible. Je la connais. Il n’y a rien de nouveau pour moi »… comme si le but de la lecture biblique était uniquement la connaissance intellectuelle.

Prenons un exemple : Nous pouvons connaître Jean 3.16 et comprendre le sens des mots et l’idée de ce verset. Mais saisissons-nous vraiment au fond de nous, combien Dieu aime le monde ? Sommes-nous pénétrés par la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur de son amour pour le monde ? Ceci est plus que la compréhension intellectuelle des mots. Il s’agit d’une intériorisation, d’une pénétration de plus en plus profonde de la Parole en nous. Il s’agit d’écouter Dieu au travers de sa Parole et de se laisser transformer par cette Parole.

Lire les textes bibliques avec une mentalité d’information et de fonctionnalité, comme un texte sur Internet, c’est confondre connaissance intellectuelle et transformation de la vie. C’est confondre connaissance intellectuelle et connaissance du cœur dans une vraie relation avec Dieu, nourrie par une lecture méditée et priée.

Il est peut-être nécessaire, dans notre ère numérique, de réapprendre à lire… lire les Écritures de façon à mettre l’accent sur le développement de la relation avec Dieu et la transformation de la vie à sa ressemblance.

Linda Oyer.

Qu'est-ce qu'un chrétien anabaptiste?

Qu’est-ce qu’un chrétien ou une chrétienne anabaptiste? A quoi le ou la reconnaît-on?

Le livre de Palmer Becker (28 pages), disponible gratuitement en ligne, tente de répondre à cette question.

3 valeurs anabaptistes sont fondamentales:

  1. Jésus est au centre de notre foi

  2. La communauté est au centre de nos vies

  3. La réconciliation est au centre de notre mission


Cela vous parle? Ne manquez pas le test (extrait du livre) ci-dessous.

Faites le test!

Êtes-vous un.e chrétien.ne anabaptiste? Les affirmations suivantes résument-elles votre compréhension de la foi chrétienne ? Si c’est le cas, vous êtes un.e chrétien.ne ayant une perspective anabaptiste !

Jésus est au centre de ma foi.

__ Je fixe mes yeux sur Jésus, l’auteur et le perfecteur de ma foi.

__ J’interprète les Écritures avec un point de vue éthique et christocentrique.

__ Je pense que le christianisme est un discipulat, et je cherche à suivre Jésus dans ma vie quotidienne.

La communauté est au centre de ma vie.

__ Je suis convaincu.e que le pardon rend la vie communautaire possible.

__ J’étudie les Écritures avec les autres pour discerner leur application pour notre temps.

__ Je suis persuadé.e que les petits groupes sont essentiels au bon fonctionnement de l’Église.

La réconciliation est au centre de ma mission.

__ Je suis appelé.e à aider chacun à se réconcilier avec Dieu par la foi en Jésus.

__ Je suis convaincu.e que la réconciliation comprend à la fois l’évangélisation et la paix.

__ Je rejette toutes les formes d’injustice et de violence, et j’encourage les alternatives pacifiques à la guerre et à d’autres conflits


Si vous avez déjà une formation en théologie, les “Études en Théologie Anabaptiste” (EFraTA) pourraient vous permettre d’affiner une compréhension anabaptiste de la foi. A la rentrée 2020, une nouvelle année débutera sur le thème: “Le Christ dans une perspective anabaptiste”. Ne la manquez pas!


Après le confinement, pourquoi pas une retraite spirituelle en ligne ?

Ce temps de confinement et plus largement ce temps de crise sanitaire et de probable crise économique perturbent l’ordonnancement de nos jours.

  • Nous nous découvrons vulnérables.

  • Nous nous retrouvons à l’arrêt.

  • Nous sommes engagés corps et âme pour soigner ou sauver des vies.

  • Nous souffrons de la maladie ou nous souffrons aux côtés de malades

  • Nous connaissons la tristesse et le deuil.

  • Nous vivons la pression de la promiscuité.

  • Nous avons enfin du temps.

Ces situations variées ont en commun de nous contraindre à un rapport différent à ce qui fait l’ordinaire de nos vies.

Quoi que nous vivions, ce temps de déséquilibre peut être une occasion de revisiter en profondeur notre rapport à Dieu, à nous-mêmes, aux autres, aux priorités…

Comment sortirons-nous du confinement et de la crise ? Difficile à dire.

Mais peut-être qu’une retraite spirituelle sera bienvenue dans quelque temps.

  • Pour se donner du repos.

  • Pour prendre du recul et être ressourcé.

  • Pour passer en revue les émotions vécues.

  • Pour recevoir consolation et espérance.

  • Pour faire le point sur son mode de vie.

  • Pour célébrer le don de Dieu.

Si vous portez en vous de telles aspirations, la retraite spirituelle proposée par le Bienenberg au mois de juillet offre une bonne occasion pour vivre un temps particulier devant Dieu et avec Dieu. En raison de la crise sanitaire, elle est proposée en ligne (par Internet) cette année, pour la première fois.

Après le confinement subi, voici la retraite spirituelle choisie !

 


Retraite spirituelle « (Re)Trouver Dieu dans ma vie et avancer avec lui », du 4 au 10 juillet 2020, avec Madeleine Bähler, Claire-Lise Meissner, Jane-Marie Nussbaumer, Sabine Schmitt, Michel Sommer.

Infos et inscriptions : https://fr.bienenberg.ch/sem/retraite-spirituelle

Des lunettes anabaptistes pour lire la Bible?

Quelles sont, en matière d’interprétation biblique, les spécificités d’une approche anabaptiste ? Ou bien : existe-t-il des lunettes anabaptistes pour lire la Bible ?

Répondre à cette question n’est pas si simple. En effet, si on s’en réfère aux étapes « classiques » de l’interprétation biblique – observer le texte, l’expliquer en tenant compte de son contexte historique et littéraire, de son genre littéraire, à la lumière des autres textes bibliques s’y rapportant, etc. –, on pourrait être tenté de conclure qu’une lecture anabaptiste ne diffère guère, puisqu’elle intègre les mêmes éléments. C’est vrai. Cependant, elle comprend aussi certaines particularités qui méritent d’être relevées, car elles confèrent l’une ou l’autre couleur à ses lunettes.

Des précisions en Christ

            « Je ne suis pas venu pour abolir [la Loi], mais pour [l’]accomplir », a dit Jésus (Mt 5.17). Il indiquait en cela que si la première alliance gardait son importance, il n’y en avait pas moins avec et par lui des choses qui s’étaient précisées, développées, qui étaient arrivées à maturité (le sens du terme « accomplir »). C’est à partir de là qu’une lecture anabaptiste de la Bible insiste particulièrement sur trois aspects :

  1. il y a matière à parler d’un « canon dans le canon »

  2. la Bible doit être interprétée de manière « christocentrique » et

  3. en tant que révélation progressive, c’est-à-dire en tenant compte de sa « trajectoire rédemptrice ». Les expressions sont un peu complexes, nous allons les expliciter.

Un canon dans le canon

Par « canon dans le canon », on comprend (dans une perspective anabaptiste) que les Évangiles, qui relatent la vie, l’œuvre et l’enseignement de Jésus, jouent un rôle central dans toute interprétation. Ce ne sont pas uniquement le sacrifice à la croix et la résurrection du Christ qui comptent, aussi importants soient-ils, mais encore son exemple, sa vie, ses actions, ses paroles, ses attitudes, etc. Le Christ des Évangiles, « tout » le Christ, révèle le cœur et le projet de Dieu pour l’humanité. C’est pourquoi non seulement l’Ancien Testament doit être lu et interprété à la lumière du Nouveau, mais encore, dans ce Nouveau, les Évangiles forment la référence ultime. De là découle le deuxième aspect.

Interprétation christocentrique

La Bible doit être interprétée de manière « christocentrique ». La pointe ici est l’affirmation selon laquelle l’interprétation la plus juste d’un texte est celle qui se réfère de la manière la plus évidente à la mémoire de Jésus le Seigneur. Christ est la révélation parfaite de Dieu. Toute interprétation d’un texte se doit donc être en cohérence avec sa personne, sa vie, son enseignement, son œuvre. Le Sermon sur la montagne (Mt 5-7) occupe ici une place particulière. C’est pourquoi, par exemple, parce qu’une telle lecture s’opposerait à l’enseignement de Jésus sur l’amour des ennemis (Mt 5.44), il ne saurait en aucun cas être juste de légitimer le recours à la violence à partir de certains textes de l’Ancien voire du Nouveau Testament. Nous en arrivons au troisième aspect.

En fonction de la trajectoire rédemptrice - Shalom

La Bible doit être interprétée en tenant compte de sa « trajectoire rédemptrice ». Le Christ est venu instaurer son Royaume, en poser les fondements. Mais ce Royaume ne sera jusqu’à son retour toujours qu’en cours de réalisation. Le plein accomplissement est encore à venir. Le projet du Royaume se résume en un mot : le Shalom, état de bien-être, santé, abondance, sécurité, etc., tel que celui-ci peut exister lorsque les humains vivent dans des relations justes vis-à-vis de Dieu, les uns vis-à-vis des autres, et vis-à-vis de la création. La trajectoire qui se dessine, pour conduire à la réalisation de ce Shalom dans l’histoire humaine, intègre une justice divine visant en premier lieu la restauration des relations, la réconciliation. C’est-à-dire une justice qui, si elle n’exclut pas de « réparer » lorsque c’est possible, reste toujours au service de la paix et de la guérison (la justice « supérieure à celle des scribes et des pharisiens » dont parlait Jésus, cf. Mt 5.20). Concernant l’interprétation biblique, cette « trajectoire rédemptrice » devient le guide pour lire les textes le plus justement possible : on ne peut tirer d’un passage une application qui ne s’inscrirait pas voire serait contraire à l’accomplissement visé, à savoir la réalisation (dès maintenant et encore à venir) du Shalom dans toutes ses dimensions. 

La communauté

À ces trois aspects s’ajoutent encore, dans une lecture anabaptiste, deux insistances particulières. L’importance, d’abord, de la communauté. Pour les anabaptistes, le fait d’être membre d’un corps, le corps de Christ, concerne aussi la manière d’interpréter la Bible et de l’appliquer.

Sous la direction du Saint-Esprit, nous avons besoin les uns des autres pour tester nos compréhensions, les vérifier, peut-être les corriger, recevoir d’autres éclairages.

Cette interprétation communautaire se vit à différents niveaux, de l’Église locale à la communion de l’Église mondiale et dans l’histoire. Surtout, elle forme un cadre – un garde-fou – pour l’interprétation personnelle. L’application, ensuite. Le processus d’étude de la Parole a pour but de nous aider à être (plus) fidèles à Jésus, à lui ressembler toujours davantage tel qu’il s’est révélé et dans la perspective de la réalisation de son Shalom. Ainsi, disent les anabaptistes, les applications que nous tirons de nos interprétations sont autant de critères pour juger de la justesse de celles-ci. En d’autres termes : si notre ou nos interprétations conduisent à des attitudes qui ne manifestent pas ou moins la justice et le Shalom du Royaume, c’est qu’elles ne sont a priori pas justes.

Conclusion

Alors, avec ce que nous avons vu, existe-t-il des lunettes anabaptistes pour lire la Bible ? Oui, sans aucun doute, même si leur couleur se retrouve assurément au moins en partie aussi dans d’autres traditions. Cependant, par les accents qu’elles mettent en avant, ces lunettes méritent entièrement d’avoir leur place dans la grande famille des « opticiens bibliques ».


Avez-vous déjà entendu parler des Études Francophones de Théologie Anabaptiste? L’année actuellement en cours porte sur la Bible dans une perspective anabaptiste et décline ces idées de multiples manières.

Retraite spirituelle : Dieu t'invite!

Au milieu du quotidien de la vie, nous apprécions les événements spéciaux de rencontre : un anniversaire, une excursion à plusieurs, un repas partagé avec des amis, etc. L’anniversaire d’un enfant dans une famille devient par exemple un moment spécial, à certaines conditions, alors même que l’on vit ensemble tout le temps et sous le même toit.

Mais voilà : un rendez-vous est fixé pour fêter l’anniversaire, rien d’autre ; des préparatifs en cuisine ont lieu dont le résultat réjouira la tablée le moment venu ; la personne fêtée se sait entourée d’affection et vient au rendez-vous dans l’expectative du moment partagé, des paroles, du chant, du gâteau, du cadeau… C’est toute une atmosphère qui transforme les membres de la famille en convives présents les uns aux autres !

Une retraite spirituelle est un peu l’équivalent d’un anniversaire : Dieu t’invite à un moment particulier, juste pour toi, et avec lui, de manière heureuse. Certes, tu vis ta vie chrétienne avec lui, tu pries et lis la Bible, plus ou moins, tu vis ta vie d’Église avec lui. Mais voilà, il t’invite à un moment spécial avec lui : une retraite spirituelle.

« Venez à l’écart, dans un lieu désert, et reposez-vous un peu » : c’est l’invitation de Jésus à ses disciples suroccupés (Mc 6.31). 

Suroccupés

Beaucoup d’entre nous sont extérieurement et intérieurement suroccupés.

Ce qui constitue notre mode de vie actuel tend à nous suroccuper, en particulier les écrans et la connexion permanente aux autres et au monde : nous sommes constamment stimulés et en interaction extérieure. Entre travail, engagement pour l’Église, famille (le cas échéant), loisirs…, beaucoup sont suroccupés.

Ce qui nous habite intérieurement peut aussi avoir tendance à nous suroccuper :

  • une volonté de contrôle des autres et des situations qui prend toute notre énergie,

  • les frustrations et les blessures accumulées qui conduisent à la lassitude et à l’absence d’énergie,

  • la dépendance intérieure envers d’autres personnes ou des produits de substitution qui nous divise,

  • le culte de la performance qui nous fait vivre dans le regard des autres…

Suroccupés extérieurement et intérieurement, nous risquons de sombrer dans l’épuisement. Il est alors temps de faire un pas de côté, d’aller à l’écart, au désert et de répondre à l’invitation de Dieu, sous la forme d’une retraite. D’abord pour se reposer physiquement et mentalement, ensuite pour se reposer délibérément dans la présence de Dieu, enfin pour vivre un temps mis à part pour Dieu.

Temps à part

Tu peux te construire ta propre retraite spirituelle, mais tu risques alors d’être un peu trop aux commandes. Entrer dans le cadre proposé d’une retraite déjà organisée, c’est comme la fête d’anniversaire que les autres ont préparée pour toi. Tu peux y vivre le moment présent, recevoir, ouvrir les mains, être disponible, présent et attentif de manière nouvelle à Dieu, à ses paroles, lui qui a préparé le rendez-vous.

Au menu :

  • l’écoute des Écritures,

  • le silence,

  • la prière,

  • les réflexions,

  • les notes par écrit,

  • une balade,

  • le repos,

  • le sommeil,

  • la détente…

Peu à peu, au cours d’une retraite, nous devenons davantage ouverts à Dieu, plus libres intérieurement, ce qui peut passer il est vrai par des moments d’émotion ou de tension, à traverser dans le dialogue avec Dieu et éventuellement avec une personne désignée pour l’accompagnement.

Lorsque je choisis de faire une telle retraite, j’aime la vivre dans un lieu de prière, comme le Centre communautaire des sœurs protestantes du Hohrodberg, dans la vallée de Munster en Alsace. Même en cas de retraite brève, j’apprends alors à ralentir mon rythme de vie, à prendre du recul sur le vécu, à veiller à ce que l’essentiel reste l’essentiel, à avancer au travers de mes zones d’ombre avec l’aide du Dieu qui a préparé le rendez-vous.

« C’est dans le calme et la confiance que sera votre force. » (Es 30.15)

Une retraite spirituelle offre un espace où (re)trouver le calme et où (ré)apprendre la confiance : le calme car on y fait le choix de se couper des bruits extérieurs pour cheminer avec Dieu, la confiance car on y apprend à ouvrir les mains pour recevoir un cadeau, parfois inattendu, du Dieu qui nous a invités. La force est alors redonnée pour retourner dans le quotidien, pour y partager la joie de la rencontre avec Dieu.

Pour aller plus loin…

-          Retraite spirituelle au Bienenberg, « Pour retrouver le sens du temps… », du 6 au 12 juillet 2019, avec Madeleine Bähler, Claire-Lise Meissner-Schmidt, Jane-Marie Nussbaumer, Sabine Schmitt, Michel Sommer.

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-          Ruth Haley Barton, Invitation to Retreat – The Gift and Necessity of Time Away with God, IVP Books, Downers Grove, 2018. Les réflexions ci-dessus sont inspirées en partie de cet ouvrage.

Dieu et nos erreurs. Quelques leçons de vie...

Une chose m’interpelle toujours à nouveau : la capacité qu’ont certains aînés à regarder en arrière et à se dire :

« Certes, tout n’a pas été parfait dans nos vies, nous avons fait des erreurs, mais Dieu s’en est servi pour nous faire avancer dans notre marche avec lui. »

Quelle belle leçon de vie, quelle leçon apaisante, surtout ! Alors que je rencontre parfois dans ma pratique pastorale des personnes qui n’arrivent pas à trouver la paix par rapport à leurs échecs et déceptions passés, je me dis qu’il y a là, chez ces aînés, une formidable force.

Le patchwork du séjour senior 2019.

Le patchwork du séjour senior 2019.

Depuis plusieurs années, dans le cadre de notre « séjour seniors » au Bienenberg, nous avons la chance de pouvoir profiter des talents d’une artiste qui illustre le thème de notre séjour par l’un de ses patchworks. Vous découvrez ci-dessus celui de l’édition 2019. Rien ne choque, à première vue… Il y a pourtant une erreur. Regardez l’escalier : au lieu de descendre, il monte. Du coup, la perspective ne correspond plus. L’auteur m’a dit :

« Tu vois, Denis, il y a une erreur. Pourtant, est-ce qu’on ne peut quand même pas le regarder, ce tableau ? Après tout, le résultat final n’est pas si mal que ça, ou bien ? N’est-ce pas une belle illustration de la manière dont Dieu peut faire du beau, même avec les erreurs de nos vies ? »

La Bible est remplie de nos erreurs, et de la manière dont Dieu a fait et continue à faire du beau avec. Un des exemples les plus parlants est de mon point de vue la vie du roi David. Je mentionne quatre situations :

  • 1 S 27.1-12 ; 29.1-11 : David, sans consulter Dieu se réfugie chez les Philistins, les ennemis d’Israël. Il se retrouve à devoir tromper Akish, se voit même enrôlé dans l’armée philistine, contre Israël. Mais Dieu conduit les choses : la méfiance des princes philistins provoque son éviction de l’armée. La leçon semble avoir porté du fruit puisqu’au chapitre suivant, lorsqu’il s’agit d’aller délivrer les familles israélites faites prisonnières à Tsiqlag, le futur roi prend cette fois le soin de consulter l’Éternel (1 S 30.6-8).

  •  En 2 S 6.1-23 (et par. 1 Chr 13.1-14 ; 15.1-29), le transport de l’arche de l’alliance se termine par un drame, la mort d’Uzza. La faute en incombe particulièrement à David qui, sans doute par négligence, n’a pas organisé ce transport selon les instructions de l’Éternel. Mais lorsque le roi se reprend, fait les choses selon les ordonnances divines, Dieu approuve la démarche et répand sa bénédiction sur le peuple.

  •  En 2 S 7.1-17 (et par. 1 Chr 17.1-14 ; 22.6-10 ; 28.2-3), David veut construire un temple à l’Éternel, mais Dieu refuse car il n’a pas été un homme de paix. Le roi doit comprendre que ce n’est pas lui qui construira une maison à l’Éternel mais le contraire (« l’Éternel te bâtira une maison », 2 S 7.11). Il se soumet admirablement et le temple sera construit par son fils, Salomon, dans toute la gloire qu’on lui connaît.

  •  En 2 S 11.1-26 ; 12.1-24, enfin : le péché de David, d’adultère et de meurtre. Le jugement divin s’abat sur lui, manifesté par la mort de l’enfant né de son union avec Bath-Shéba, la femme d’Urie qu’il a fait tuer. Mais David entre dans un chemin de repentance. Dieu fait alors du beau : de Salomon, le deuxième fils qu’il aura avec Bath-Shéba, il est dit que « l’Éternel l’aima ». Plus encore, c’est de cette descendance sera issu le Messie. Quant à « la femme d’Urie », elle sera l’une des trois femmes à être nommée dans la généalogie de Jésus-Christ (cf. Mt 1.6).

Autant d’exemples – et il y en aurait bien d’autres dans la Parole – illustrant la manière dont Dieu compose avec nous et reste fidèle, en dépit de nos erreurs et nos manquements… Comme il est bienfaisant de pouvoir revisiter son passé en se disant :

« Oui, tout n’a pas été parfait, j’ai fait des erreurs, mais Dieu en a tiré du beau. »

Vous êtes intéressés d’en savoir plus ? Alors, si le cœur vous en dit, venez nous rejoindre au séjour seniors. On accepte aussi des plus jeunes !


 

Dieu et nos erreurs. Leçons de la vie de David

Séjour seniors au Bienenberg, du 12 au 17 mai 2019 (arrivée le dimanche en fin d’après-midi, départ le vendredi vers 15 heures).

Renseignements et inscriptions sur fr.bienenberg.ch/sem/sejour-seniors-2019.

 

 

 

5 conseils pour présider un culte

Pour qui préside des cultes ou pour qui va s’y lancer, voici 5 conseils développés sur une liste 20[1]. Pour en savoir plus sur les 15 autres, venez suivre la Formation Biblique pour le Service dans l’Église au Centre de Formation du Bienenberg !

  1. Oriente l’attention vers Dieu et non vers ta personne

L’assemblée réunie, qu’elle en ait une pleine conscience ou pas, est présente pour Dieu. Toi qui préside le culte ou une partie du culte, fais le maximum pour suggérer que nous sommes là à cause de Dieu, Père, Fils, Saint-Esprit. L’important, c’est Dieu, pas toi !

Il s’agit donc de parler de Dieu, de parler à Dieu, de parler au nom de Dieu. Et pas tant de toi, de ton vécu avant le culte, de tes préparatifs, de ton état d’esprit du moment. Lorsque tu fais cela, tu invites l’assemblée à se concentrer sur toi. Veille en particulier aux premiers mots prononcés au début du culte : ils indiquent qui est important.

L’enjeu, ce sont la place et l’importance de Dieu, signifiées en paroles. La personne qui préside accomplit cette tâche au service de Dieu : elle se place au-dessous de Dieu.

2. Sois flexible quant à la forme

Cela vaut pour tous !

Si tu es plutôt attaché à un « temps de louange » qui inclut 5 chants-de-suite-et-forcément-du- JEM-avec-courbe-de-progression-sinon-ce-n’est-pas-une-vraie-louange, ou si tu es adepte d’une liturgie où tout est écrit dans le moindre détail à l’avance, l’appel à la flexibilité s’impose, contre un formalisme réducteur.

Si tu es plutôt porté à croire que la spontanéité et les changements de dernière seconde sont plus inspirés ou si tu estimes inutile de préparer le culte en concertation avec le prédicateur ou la prédicatrice, l’appel à la flexibilité s’impose, contre un « informalisme » tout autant réducteur. Dieu peut t’inspirer une parole au millionième de seconde, pas de doute ! Dieu peut t’inspirer une parole 5 jours à l’avance tout aussi bien, pas de doute !

Être flexible se manifeste donc par de la liberté par rapport à un cadre réfléchi. Par exemple[2] :

1. rassemblement

2. écoute de la Parole de Dieu

3. réponse à la Parole de Dieu

4. envoi et bénédiction

Cette structure, pensée théologiquement, exprime ce qui est important dans un culte et peut être « remplie » avec flexibilité, qui est un appel à la créativité.

L’enjeu est de développer une vision globale du culte, pensée bibliquement et théologiquement, tout en variant les formes dans un état d’esprit de soumission mutuelle.

 

3.    Favorise et encourage une expérience communautaire

4.    Développe un climat de célébration

Présider un culte, ce n’est pas apporter une prédication qui ne dit pas son nom. Ce n’est pas non plus partager un long témoignage sur soi. Présider, c’est aider l’assemblée à célébrer son Dieu. Car le culte de l’Église est une fête. Pourquoi ? Parce que le Christ est ressuscité. Sans sa résurrection, les chrétiens ne se réuniraient pas. Sans sa résurrection, les premiers chrétiens ne se seraient pas réunis le premier jour de la semaine. Le culte chrétien a une tonalité festive, joyeuse, dans la présence du Ressuscité ! Les chants et la musique sont une aide, à condition qu’ils ne se transforment pas en spectacle. Ce climat de célébration n’exclut ni la solennité de la confession de péché ni l’expression de la souffrance et de la plainte. Le culte est une fête chrétienne.

Un sourire, des gestes accueillants, un chant à pleine voix, des paroles invitantes, du silence nourri de la Parole, des mots de transition adaptés, une touche artistique ou symbolique, un lieu inspirant, tout cela favorise un climat de célébration.

L’enjeu, c’est de proclamer ensemble que Jésus-Christ est ressuscité et de vivre en ressuscités, sans oublier la communion aux souffrances du Christ.

 

5.    Intègre une grande diversité d'expériences quotidiennes (joie et tristesse par ex.)

6.    Concerte-toi à l'avance avec la personne qui apporte la prédication, pour que le culte forme une unité

7.    Contribue à dérouler un fil rouge, par les transitions, par le choix des chants, par les textes bibliques, par les prières..., en recentrant, en soulignant... aussi face aux imprévus...

Si la prédication porte sur l’argent et sa gestion, déroule un fil rouge sur Dieu source de tout don. Si la prédication encourage à la confiance en Dieu dans les difficultés, choisis comme fil rouge l’affirmation selon laquelle Dieu est un refuge. Lors d’une transition, le fil rouge peut reprendre une parole de ce qui précède ou de ce qui suit et relier ainsi deux éléments du culte. Le fil rouge peut se voir aussi par les paroles des chants choisis, par les prières, par un témoignage...

On peut choisir d’annoncer dès le début un fil rouge. On peut aussi choisir de laisser l’assemblée le deviner et le repérer.

L’enjeu, c’est de permettre à l’assemblée de s’imprégner d’un thème décliné au fil du culte, afin de repartir avec une idée forte générale. Les échos au thème tout le long du culte renforcent cette idée générale et la font résonner pour que l’Esprit l’applique dans la communauté et sur l’esprit des participants.

8. Maintiens un équilibre entre réflexion et émotions, entre intériorité et expressivité

9. Favorise la convivialité, mais pas au point de perdre le sens de la transcendance de Dieu.

10. Inclus une variété de types et de formes de prière

11. Offre un temps de paroles libres

12. Inclus des moments de silence favorisant l'écoute et la réflexion

13. Utilise largement les textes bibliques dans toutes les parties du culte

14. Planifie la participation de plusieurs personnes – pour les lectures, la prière, la musique, un témoignage, etc.

15. Fais de la place au cours du culte pour les différents âges présents (par des moments particuliers, par le choix de chants, etc.)

16. Encourage la créativité et l'expression de dons artistiques (poésie, arts visuels, danse, mimes, sketchs...)

17. Veille sur ton langage : inclusif, clair, simple, direct, à propos, et sur ton langage non verbal...

18. Fais ce que tu as prévu de faire sans annoncer que tu vas le faire !

On croit qu’il faut dire à l’avance que l’on va chanter les chants 879, 427 et 602 dans le JEM, qu’il faut dire le titre du chant, qu’il faut prévenir que l’on va prier soi-même, que Sandrine va lire le psaume 139, les verset 1 à 20, etc. Résultat : le culte est haché de consignes non nécessaires qui sont autant d’interférences, c’est-à-dire, ces multiples paroles inutiles (pardon !) qui alourdissent et détournent finalement de l’interaction entre l’assemblée et Dieu et vice-versa.

Bien sûr, il arrive que des consignes ou des explications soient utiles. Mais on peut aussi les transmettre d’un geste (doux), comme pour inviter l’assemblée à se lever ou à prendre place. Présider un culte, c’est vivre le culte, c’est célébrer et non passer son temps à expliquer et à annoncer ce qui va suivre.

L’enjeu, c’est, par la présidence de culte, de faciliter la communion avec Dieu, sa Parole, son Esprit, de manière priante.

 19. Veille à ce que le culte équipe en vue de la vie quotidienne

20. Préside le culte en faisant ta part et en t’attendant à l'action du Saint-Esprit au travers de ce que tu as préparé, dit, prié, célébré, partagé, etc.

 Michel Sommer


Pour aller plus loin…

On peut s’inscrire à FBSE ici : https://fr.bienenberg.ch/fbse

On y traite entre autres de la théologie du culte, de la présidence de culte, avec aussi des ateliers pratiques, comme lors du week-end FBSE des 15-16 février 2019.

[1] Ces réflexions sont inspirées au départ du livre d’Eleanor Kreider, Enter His Gates – Fitting Worship Together, Marshall Pickering, 1989, p. 51-52, et adaptées et développées.

[2] Voir Janie Blough, Dieu au centre – Retrouver le sens du culte, Éditions Mennonites, Montbéliard, Dossier de Christ Seul 3/2013